Pour la plupart des gens, les palmes, les masques et les combinaisons en néoprène sont des équipements de loisirs. Mais pour le groupe à but non lucratif SeaWomen of Melanesia, Championne de la Terre dans la catégorie « Inspiration et action » 2021, ce sont les outils du changement.

Vêtues d'un équipement de plongée, la trentaine de membres du groupe surveillent la santé des fragiles récifs coralliens qui entourent la Mélanésie, un groupement de nations insulaires du Pacifique Sud. Leur objectif : enseigner aux femmes locales des compétences en biologie et en plongée sous-marine afin qu'elles puissent surveiller la santé des récifs coralliens et créer et restaurer des zones marines protégées.   

« Je me souviens de la première fois où je me suis rendue dans un village de pêcheurs pour essayer de recruter des femmes pour rejoindre notre programme », se souvient Israelah Atua, membre des SeaWomen. « Elles ne voulaient même pas nous écouter. Mais nous les avons convaincues que la conservation marine est nécessaire pour protéger tous nos moyens de subsistance. »

Les SeaWomen travaillent dans ce que l'on appelle le Triangle de Corail, qui couvre quelque 5,7 millions de kilomètres carrés entre la Grande Barrière de Corail et les archipels insulaires de Mélanésie et d'Asie du Sud-Est. Débordant de vie marine, c'est l'une des premières destinations au monde pour le tourisme sous-marin et le siège d'une importante industrie de la pêche. Il est également exceptionnellement menacé par l'augmentation de la population humaine et le niveau des déchets.

Les récifs coralliens du monde entier sont menacés par les changements climatiques, la surpêche et la pollution. Rien que depuis 2009, près de 14 % des coraux de la planète ont disparu, selon un récent rapport du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE). Parmi ceux qui restent, beaucoup sont en danger.

Des récifs sains sont indispensables pour résister aux effets du changement climatique, notamment à l'acidification des océans et aux événements extrêmes. Or, le rapport montre que, si des mesures draconiennes ne sont pas prises pour limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C, le nombre de coraux vivants sur les récifs pourrait diminuer de 70 à 90 % d'ici à 2050.   

La bonne nouvelle est que les récifs coralliens sont résilients et peuvent se reconstituer si l'environnement marin est préservé. L'initiative SeaWomen, qui est gérée par la Coral Sea Foundation, travaille depuis 2018 à travers les îles Salomon et la Papouasie-Nouvelle-Guinée pour promouvoir la restauration des récifs coralliens et soutenir l'établissement de zones d'interdiction de pêche. Elle soutient également les zones marines protégées dans les deux pays, afin de garantir une vie piscicole abondante sur laquelle les villageois pourront compter à l'avenir.

Les SeaWomen modifient simultanément les récits concernant le rôle des femmes dans leur communauté et leurs possibilités de leadership.

« Le fait d'avoir une femme dans la communauté qui peut défendre le processus de réserve marine et la conservation marine, dans une langue locale, est important pour faire passer les premiers messages sur l'importance des zones marines protégées », a déclaré Andy Lewis, directeur exécutif de la Coral Sea Foundation. « Il ne peut y avoir de travail de conservation dans ces pays sans reconnaissance explicite de la culture indigène. »

Pour les SeaWomen, la combinaison des savoirs indigènes et de la science est essentielle à leur engagement auprès des communautés. Apprendre des membres de la communauté où les poissons sont les plus abondants à une certaine période de l'année, ou faire correspondre le changement de couleur des récifs coralliens avec les données des études sous-marines, ou comprendre comment les marées peuvent se déplacer en fonction du changement climatique est important pour la sensibilisation qu'elles font pour démontrer la valeur de la préservation et des zones marines protégées.

Mais les SeaWomen affriment aussi qu'elles remettent en question les conventions indigènes sur le rôle de la femme dans son foyer, sa communauté et la société.

« Lorsque vous formez une femme, vous formez l’ensemble de la société », affirme Evangelista Apelis, une SeaWoman et co-directrice du programme SeaWomen basé en Papouasie-Nouvelle-Guinée. « Nous essayons d'instruire les femmes, de les faire participer, pour qu'elles puissent ensuite repartir et avoir des effets bénéfiques au sein de leur propre famille et de leur communauté. »

Les SeaWomen suivent une formation rigoureuse en sciences marines, complétée par une formation pratique aux techniques d'étude des récifs et à l'écologie des récifs coralliens. Elles apprennent ensuite à plonger.

« Ce que j'aime le plus dans mon travail, c'est de pouvoir découvrir la beauté du monde sous-marin », a déclaré Mme Apelis. « Avant de descendre, on imagine toutes sortes de choses, mais la réalité est encore plus envoûtante - les poissons, les épaves... c'est comme si tout prenait vie. » Chacune des SeaWomen est soutenue par une certification de plongée sous-marine reconnue internationalement, et apprend à utiliser le GPS, les caméras sous-marines et la vidéo pour recenser les populations de poissons et de coraux sur les récifs du Triangle de Corail. Leur travail depuis 2018 a conduit à des propositions pour plus de 20 nouvelles aires marines protégées dans les eaux de Papouasie-Nouvelle-Guinée et des îles Salomon.

« Les récifs coralliens sont un sanctuaire pour la vie marine et sous-tendent les économies d'innombrables communautés côtières », a déclaré Inger Andersen, directrice exécutive du PNUE. « Les récifs coralliens sont essentiels pour l'avenir de notre planète et le travail accompli par les SeaWomen pour sauvegarder ces écosystèmes magnifiques et diversifiés n'est rien de moins qu'une source d'inspiration. »

Pour Naomi Longa, chef d'équipe des SeaWomen dans la province de West New Britain en Papouasie-Nouvelle-Guinée, aider à créer des réserves marines signifie non seulement qu'elle est un leader dans sa communauté, mais aussi qu'elle fixe un cap pour l'avenir. La pression démographique sur la terre s'ajoutant au stress sur la mer, le programme de réserves marines est un investissement dans le bien-être à long terme des communautés vulnérables aux stress et aux chocs.

« En fait, nous sauvegardons la nourriture pour la génération future », a-t-elle déclaré. « Il y a des espèces qui disparaissent, donc certaines des espèces qui vivent dans ces réserves marines seront peut-être les seules qui resteront lorsque nos générations futures seront nées. »

 

Les Champions de la Terre et les Jeunes champions de la Terre du Programme des Nations unies pour l'environnement récompensent les personnes, les groupes et les organisations dont les actions ont un impact transformateur sur l'environnement. Remis chaque année, le prix des Champions de la Terre est la distinction environnementale la plus prestigieuse décernée par les Nations unies.

L'Assemblée générale des Nations unies a déclaré que les années 2021 à 2030 seraient la Décennie des Nations unies pour la restauration des écosystèmes. Menée par le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) et l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), avec le soutien de partenaires, cette Décennie est conçue pour prévenir, stopper et inverser la perte et la dégradation des écosystèmes dans le monde entier. Elle vise à faire revivre des milliards d'hectares, couvrant les écosystèmes terrestres et aquatiques. Appel mondial à l'action, la Décennie des Nations unies rassemble le soutien politique, la recherche scientifique et les moyens financiers pour intensifier massivement la restauration. Visitez le site www.decadeonrestoration.org pour en savoir plus.

Quand Sir David Attenborough était enfant, il passait une grande partie de son temps libre à gambader dans les carrières abandonnées de la campagne anglaise, marteau en main. Sa proie : des ammonites fossilisées, des mollusques en forme de spirale qui vivaient à l’époque des dinosaures.

Pour le jeune David, les fossiles étaient semblables à des trésors enfouis et il était stupéfait d’être le premier à pouvoir les observer depuis leur fossilisation, survenue il y a des dizaines de millions d'années.

Le monde naturel le captivera toute sa vie.

Aujourd’hui, Sir David Attenborough, âgé de 95 ans, est sans doute le réalisateur et présentateur de documentaires d’histoire naturelle le plus connu au monde. Au cours d’une carrière qui a débuté dès les débuts de la télévision, il a écrit et présenté certains des documentaires les plus influents relatant l’état de la planète, notamment la série Life, produite pendant une décennie et qui comporte neuf épisodes.

Grâce à sa voix qualifiée de « voix de Dieu de la narration » par le New York Times et sa curiosité insatiable, il a passé 70 ans à décrire la beauté du monde naturel et à souligner les menaces auxquelles notre planète est confrontée. Au fil du temps, il a offert à des centaines de millions de téléspectateurs la possibilité d’un avenir plus durable.

« Si le monde doit effectivement être sauvé, alors Sir David Attenborough aura davantage contribué à son salut que quiconque ayant jamais vécu », a écrit l’écologiste et auteur Simon Barnes.

Les Nations unies ont reconnu l’influence considérable de Sir David Attenborough sur le mouvement environnemental mondial en lui remettant le prix « Champions de la Terre » pour l’ensemble de son œuvre. Ce prix, la plus haute distinction environnementale décernée par les Nations unies, récompense les personnes ayant consacré leur vie à la lutte contre des crises telles que le changement climatique, la disparition des espèces et la pollution.

« Vous avez été une source d’inspiration extraordinaire pour tant de personnes », a déclaré Inger Andersen, directrice exécutive du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), lors de la remise du prix à M. Attenborough.

« Vous avez parlé au nom de la planète bien avant que n’importe qui d’autre ne le fasse et vous continuez à déployer vos effrots inlassables. »

Parallèlement à son travail dans les médias, Sir David Attenborough est l’une des principales voix du mouvement environnemental mondial. Il a participé à des sommets historiques, comme la Conférence de Paris sur le changement climatique de 2015, où il a appelé à un effort mondial unifié pour combattre les menaces qui pèsent sur la Terre.

Il collabore également avec le PNUE depuis quarante ans, prêtant sa voix à une série de campagnes et de courts métrages qui ont mis en lumière les efforts de l'organisation pour lutter contre la crise climatique, la perte de biodiversité et la pollution. Ce travail est motivé par la conviction qu’aucun pays ne peut à lui seul résoudre les problèmes environnementaux de la planète.

« Nous vivons à une époque où le nationalisme ne suffit tout simplement pas », a déclaré M. Attenborough en acceptant le prix Champion de la Terre du PNUE pour l’ensemble de son œuvre. « Nous devons avoir le sentiment d'être tous citoyens de cette unique planète. Si nous oeuvrons ensemble, nous pouvons résoudre ces problèmes. »

Sir David Attenborough a obtenu un diplôme en sciences naturelles à l’université de Cambridge en 1947, mais il s’est vite rendu compte qu’il n’avait pas les dispositions nécessaires pour mener une vie de chercheur. C’est ainsi qu’il est entré à la British Broadcasting Corporation (BBC), au moment où la télévision commençait à pénétrer dans les foyers.

Sa première apparition à la télévision a eu lieu le 21 décembre 1954, dans Zoo Quest, une série itinérante qui a permis aux Britanniques de découvrir des créatures exotiques, comme les orangs-outans et les dragons de Komodo.

Administrateur et présentateur également talentueux, M. Attenborough gravit les échelons du radiodiffuseur national britannique (BBC), pour finalement prendre la tête de BBC Two. C’est là qu’il a commandé le Monty Python's Flying Circus, entre autres séries.

Mais l’administration ne lui convenait pas vraiment et, en 1973, M. Attenborough quitte la direction pour retourner à la réalisation de films.

Le résultat sera sa série phare datant de 1979, Life on Earth, une épopée qui retrace l’histoire du monde vivant, des premiers microbes à l’humanité.

La série a duré trois ans et M. Attenborough a parcouru 1,5 million de kilomètres pendant le tournage. Par son ampleur et son ambition, Life on Earth allait redéfinir le documentaire d’histoire naturelle et a été vue par quelques 500 millions de spectateurs.

Au cours des trois décennies suivantes, M. Attenborough écrira et présentera huit autres grands documentaires, attirant ainsi l’attention du monde entier sur ce qu’il appelle la « merveille spectaculaire » de la nature.

Cependant, tout au long de sa carrière, M. Attenborough a été témoin de l’effondrement du monde naturel. Alors que la présence humaine s’est accrue, celle de la nature a reculé. L’activité humaine a modifié les trois quarts de la surface de la Terre et un million d'espèces sont en danger d’extinction.

« Aussi immensément puissants que nous soyons aujourd’hui, il est tout aussi clair que nous serons encore plus puissants demain », a-t-il déclaré à la fin du film La Planète vivante de 1984. « Il est clair que nous pourrions dévaster le monde. La survie de [la Terre] repose désormais entre nos mains. »

Les films de M. Attenborough ont montré au monde que les ressources naturelles ne sont pas infinies, que la nature est délicate et doit être protégée, et que l’humanité s’éloigne dangereusement de la nature.

L’année dernière, alors que ses 95 ans approchaient, il s’est adressé aux dirigeants mondiaux lors de la conférence des Nations unies sur le changement climatique à Glasgow, en Écosse.

« Nous sommes déjà en difficulté », a-t-il dit. « Est-ce ainsi que notre histoire va se terminer ? L’histoire de l’espèce la plus intelligente condamnée par cette caractéristique trop humaine qui consiste à ne pas voir la situation dans son ensemble pour poursuivre des objectifs à court terme. »

Mais, comme presque toujours, les paroles de M. Attenborough étaient teintées d’optimisme. L’un des thèmes récurrents de ses films est que, malgré l’état désastreux de la planète, l’humanité peut encore réparer les dégâts qu’elle a causés.

« Tout n’est pas sombre », a-t-il déclaré en 2020 dans Une vie sur notre planète, un retour sur sa carrière. « Nous avons une chance de nous racheter, d’achever notre parcours de développement et de redevenir une espèce en équilibre avec la nature. Tout ce dont nous avons besoin, c’est de la volonté de le faire. »

Dans ce même film, il propose une solution pour faire la paix avec la nature. Il s'agit d'augmenter le niveau de vie dans les pays les plus pauvres afin de freiner la croissance démographique, d’adopter des énergies propres, telles que l’énergie solaire et l’énergie éolienne, de consommer davantage d'aliments d’origine végétale, plus respectueux de la planète, et d’abandonner les combustibles fossiles.

« Si nous prenons soin de la nature, la nature prendra soin de nous », a-t-il déclaré. « Il est maintenant temps pour notre espèce d’arrêter de simplement croître mais d’établir une vie sur notre planète en équilibre avec la nature, de commencer à prospérer. »

Le travail et l’activisme de David Attenborough lui vaudront d’être anobli (deux fois) et de prêter son nom à des dizaines d’espèces, qu’il s’agisse de l’attenborosaurus (un reptile nageur préhistorique) au nepenthes attenboroughii (une plante carnivore).

Ces dernières années, Attenborough a continué à prêter sa voix à des documentaires sur l’histoire naturelle et a obtenu deux nominations aux Emmy Awards en 2021 pour sa narration. (Au cours de sa carrière, il a remporté trois Emmy et huit BAFTA).

Depuis des décennies, M. Attenborough est sollicité par les dirigeants du monde entier pour la recherche de solutions aux crises qui menancent le monde naturel, et peut-être aussi pour obtenir une dose de son enthousiasme.

En 2015, il s’est rendu à la Maison Blanche pour avoir une conversation avec le président des États-Unis, Barack Obama. M. Obama a demandé à M. Attenborough ce qui avait déclenché sa « profonde fascination » pour le monde naturel.

« Je n’ai jamais rencontré un enfant qui ne s’intéresse pas à l’histoire naturelle », a-t-il répondu, se souvenant peut-être de ses journées de chasse aux fossiles dans la campagne anglaise. « La question est plutôt de savoir comment peut-on perdre cet intérêt ».

La terrible explosion qui a ravagé le port de Beyrouth en août 2020 a laissé derrière elle un enchevêtrement de béton, de métal et de verre brisé. La puissance de la déflagration a provoqué l’explosion d’un stock de nitrate d’ammonium et a été ressentie à plus de 20 km de distance.

Face à l’ampleur du gigantesque nettoyage auquel la capitale libanaise allait devoir procéder, arcenciel a été une des nombreuses associations à but non lucratif à intervenir, collectant 9 000 tonnes de débris de verre dans les quartiers touchés.

Ce verre devait être broyé, fondu et remodelé en vue d’une utilisation future.

« Après l’explosion de Beyrouth, nous avons mené plusieurs projets pour aider à réhabiliter les quartiers et à collecter les débris de verre », explique Marc-Henri Karam, responsable des programmes environnementaux d’arcenciel.

Cette initiative illustre parfaitement le rôle qu’arcenciel, lauréate du prix « Champions de la Terre » de cette année dans la catégorie « Inspiration et action », a joué pour aider le Liban à gérer ses déchets au cours des deux dernières décennies.

Dans un pays aux prises avec des problèmes de gestion des déchets, cette association dirigée par des bénévoles, et fondée en 1985, a organisé des programmes visant à tout recycler, des déchets médicaux aux vêtements. Forte de ses années d’expertise en tant que leader dans le traitement des déchets hospitaliers, elle a également aidé le Liban à élaborer sa première loi sur la gestion des déchets.

« Nous avons identifié de nombreux problèmes affectant l’environnement, en particulier la communauté et la santé de la société », a déclaré Robin Richa, directeur général d’arcenciel. « Nous avons voulu faire preuve de stratégie en identifiant les activités pour lesquelles nous pouvons avoir une influence durable. »

 

Gestion des déchets

arcenciel a été créée pour soutenir les blessés de la guerre civile au Liban. Sa vocation à servir la société a perduré jusque dans ses activités actuelles, afin d’aider les personnes marginalisées à prendre part à la vie de leur communauté, tout en encourageant la durabilité de l’environnement et la préservation des ressources naturelles.

Grâce à son programme « Agriculture durable et environnement », arcenciel propose des services de gestion des déchets solides, tout en apportant son savoir-faire et en menant des actions de sensibilisation au Liban, pays qui avait besoin de tout le soutien possible pour traiter ses déchets de manière sûre et systématique. En 2003, l’association a lancé un programme d’élimination des déchets médicaux qui, s’ils sont abandonnés à l’air libre dans les décharges et les sites d’enfouissement, peuvent provoquer des infections, transmettre des maladies, contaminer l’eau et polluer les écosystèmes.

Aujourd’hui, arcenciel traite 87 % des déchets hospitaliers du Liban, grâce à des appareils de stérilisation par la vapeur pour les transformer en déchets assimilables à des déchets domestiques. Sa mission s’est révélée encore plus cruciale pendant la pandémie de COVID-19, qui a généré des dizaines de milliers de tonnes de déchets médicaux supplémentaires dans le monde entier (seringues, aiguilles, kits de test, masques, gants et équipements de protection individuelle). Rien que pour l’année 2020, arcenciel a traité 996 tonnes de déchets médicaux.

« Nous réduisons le risque de contamination et de déchets infectieux dans les décharges. Cela se traduit par des sols plus propres, des eaux souterraines plus saines et une meilleure hygiène pour tous », explique Marc-Henri Karam.

« La réduction des déchets et la promotion du recyclage sont essentielles pour mettre un terme à la culture du jetable qui pollue notre planète et contribue à l’urgence climatique », déclare Inger Andersen, directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l’environnement. « Les initiatives d’arcenciel en matière de gestion des déchets sont une source d’inspiration. Cette association contribue à créer un environnement sain pour les générations futures. »

 

Réagir face à la crise

Une gestion écologiquement rationnelle des déchets est essentielle pour protéger les écosystèmes et, à terme, la santé publique, objectifs fondamentaux de l’initiative Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes.

Arcenciel a contribué à améliorer la gestion des déchets dans deux des plus grands camps de réfugiés palestiniens du Liban et dans trois camps de réfugiés syriens dans la région de la Bekaa. Dans cette région, l’association a montré aux habitants comment collecter, trier et recycler les déchets, ce qui a permis d’améliorer leurs conditions de vie et d’assurer un revenu aux réfugiés.

Faire face aux crises est la marque de fabrique de l’action menée par arcenciel. En 2015, lorsque la fermeture de la décharge de Naameh a entraîné l’accumulation de déchets dans les rues de Beyrouth et sur le mont Liban, arcenciel a plus que doublé la quantité de matériaux recyclés, collectant 852 tonnes de déchets. L’association a également publié un manuel sur la manière de gérer efficacement les déchets, dispensé une formation aux municipalités pour qu’elles disposent de leurs propres centres de gestion des déchets et mené des campagnes de sensibilisation du grand public sur ce sujet.

L’association applique également sa philosophie de réutilisation et de recyclage aux vieux meubles et vêtements. Tout ce qui peut être récupéré est retiré de la mise en décharge afin d’être revalorisé et revendu.

 

Antécédents en matière juridique

arcenciel a aidé le Liban à élaborer sa première loi sur la gestion des déchets solides, loi adoptée en 2018, et a mis au point une stratégie nationale de gestion des déchets désormais utilisée par le ministère de l’Environnement et le ministère de l’Agriculture.

« Il est désormais obligatoire pour les hôpitaux de traiter leurs déchets, et c’est là l’une de nos plus grandes avancées », a déclaré Marc-Henri Karam.

 

Préparer l’avenir

Au Domaine de Taanayel, un terrain de 2,3 km² dans la région de la Bekaa, arcenciel a construit une ferme alimentée presque exclusivement par l’énergie solaire, et ce, afin de promouvoir une agriculture durable. Dans le but de limiter l’érosion des sols et de réduire la consommation en eau, arcenciel utilise la fertirrigation, un procédé qui consiste à administrer les éléments fertilisants aux plantes de manière plus ciblée, par le biais du système d’irrigation. Le Domaine est également le seul producteur de biopesticides de la région, lesquels produisent moins de résidus toxiques que les pesticides chimiques classiques. Le site est également équipé d’un écolodge qui vise à promouvoir un tourisme responsable et respectueux de l’environnement local et de ses écosystèmes.

Malgré les nombreux défis engendrés par les crises successives qui ont frappé le Liban, l’équipe de l’association arcenciel se dit déterminée à poursuivre son travail de protection de l’environnement pour les générations à venir.

« Ce qui nous motive, c’est de préparer l’avenir », a déclaré Robin Richa.

Constantino Aucca Chutas a commencé à s’intéresser à la protection de l’environnement il y a trente ans, lors d’un travail sur le terrain effectué à Cuzco, au Pérou, alors qu’il était étudiant en biologie.

À l’époque, les magnifiques versants des Andes péruviennes qui entouraient la ville étaient soumis à la pression de l’exploitation forestière illégale et de l’expansion des exploitations agricoles.

« La protection de la nature est devenue une nécessité », expliquait récemment M. Aucca lors d’un entretien avec le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). Son désir de protéger la nature s’est renforcé sous l’impulsion de ses grands-parents, des agriculteurs indigènes quechuas. « Ils me disaient : "Constantino, ton nom de famille, ‘Aucca’, signifie 'guerrier'. Tu dois essayer de faire quelque chose pour nous, les agriculteurs." »

Constantino Aucca a donc consacré les 30 dernières années à honorer cette demande. Il mène, au sein des communautés locales, une action visant à protéger les forêts d’Amérique du Sud, indispensables pour lutter contre le changement climatique et abritant des espèces végétales et animales uniques.

La Asociación de Ecosistemas Andinos, fondée par M. Aucca en 2000, a aidé à la plantation de plus de 3 millions d’arbres au Pérou et à la protection ou à la restauration de 30 000 hectares de terres.

Pour récompenser ses efforts, M. Aucca s’est vu décerner le titre de « Champion de la Terre » dans la catégorie « Inspiration et action », la plus haute distinction environnementale décernée par les Nations Unies.

L’Amérique latine et les Caraïbes abritent certains des écosystèmes forestiers les plus riches en biodiversité du monde, mais plus de 40 % des forêts de la région ont été déboisées ou détériorées à cause de projets miniers, agricoles et de construction.

Le projet de protection de l’environnement de M. Aucca a permis aux communautés Indigènes, un groupe traditionnellement marginalisé, d’obtenir des droits sur leurs terres et de créer des zones protégées pour leurs forêts naturelles.

« Le travail avant-gardiste de Constantino Aucca Chutas nous rappelle que les communautés Autochtones sont en première ligne dans la lutte pour la protection de l’environnement », a déclaré Inger Andersen, directrice exécutive du PNUE. « Comptant parmi les meilleurs défenseurs de la nature, leurs contributions à la restauration des écosystèmes sont inestimables et ne sauraient intervenir à un moment plus crucial pour la planète. »

Restauration des « forêts de nuages »

La Asociación de Ecosistemas Andinos a mobilisé des milliers de personnes à Cuzco pour protéger et restaurer les anciennes forêts de Polylepis, qui dominaient autrefois les hautes Andes. Ces arbres « nuages » qui poussent jusqu’à 5 000 mètres au-dessus du niveau de la mer, à une altitude plus élevée que toutes les forêts du monde, jouent un rôle vital dans la lutte contre le changement climatique et la perte de biodiversité.

Ils abritent des espèces sauvages menacées, emmagasinent le carbone, stabilisent les sols et constituent une source d’eau pour les communautés agricoles situées en aval. Du fait de l’altitude à laquelle ils poussent , les forêts de Polylepis absorbent la brume et retiennent d’énormes quantités d’eau provenant des nuages, qui sont progressivement évacuées par la couverture de mousse, permettant ainsi le maintien du débit des ruisseaux de montagne.

De vastes zones des Andes étaient autrefois couvertes de Polylepis, il n’en reste plus que 500 000 hectares aujourd’hui, conséquence de décennies de déforestation pour la production de bois de chauffage, le pâturage du bétail, l’exploitation forestière et la construction de routes. La disparition de ces forêts de montagne a des répercussions sur la pénurie d’eau, affectant la vie et les moyens de subsistance de millions de personnes.

Pour assurer la survie des futures générations d’agriculteurs indigènes, l’association créée par M. Aucca organise des festivals de plantation d’arbres chaque année à Cuzco. La journée commence par des rituels ancestraux issus du riche patrimoine inca de la région. Des musiciens soufflent dans des conques et frappent des tambours en hommage à la nature, tandis que les villageois gravissent les sentiers de montagne escarpés pour planter des arbres, certains portant des ballots de plants sur leur dos, d’autres des bébés.

« Lorsque nous plantons un arbre, nous rendons quelque chose à notre Mère la Terre. Nous sommes convaincus que, plus nous plantons d’arbres, plus les gens seront heureux. C’est une fête, un jour de bonheur », explique M. Aucca.

Récompenser les communautés locales

Pour récompenser leurs efforts de restauration des habitats menacés et de protection des oiseaux et d’autres espèces sauvages, Acción Andina aide les communautés à obtenir des titres de propriété pour leurs terres, ce qui leur assure une protection juridique contre l’exploitation par les compagnies forestières, minières et pétrolières.

Constantino Aucca et son équipe ont également créé des zones protégées, fait déplacer des médecins et des dentistes dans des villages de montagne reculés et équipé les communautés de panneaux solaires et de poêles en argile à combustion propre dans le but d’améliorer leur qualité de vie.

Le projet de M. Aucca en matière de régénération des écosystèmes va au-delà de son Pérou natal. En 2018, l’Asociación de Ecosistemas Andinos et l’organisation américaine à but non lucratif Global Forest Generation ont créé Acción Andina afin de développer le modèle de reboisement dirigé par la communauté dans d’autres pays andins.

En tant que président de Acción Andina, Constantino Aucca supervise désormais les plans ayant pour objectif de protéger et de restaurer 1 million d’hectares de forêts d’importance cruciale en Argentine, en Bolivie, au Chili, en Colombie et en Équateur, ainsi qu’au Pérou, au cours des 25 prochaines années. Son travail reflète parfaitement les objectifs de l’initiative Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes, qui appelle à une action mondiale pour prévenir, stopper et inverser la dégradation des écosystèmes.

Le bien commun

Des études montrent que la restauration de 20 millions d’hectares d’écosystèmes détériorés en Amérique latine et dans les Caraïbes pourrait générer des bénéfices de 23 milliards de dollars des États-Unis sur une période de 50 ans. Des écosystèmes prospères sont également essentiels pour maintenir le réchauffement climatique en dessous de 2 °C et aider les sociétés et les économies à s’adapter aux effets du changement climatique.

Le travail de M. Aucca repose sur son profond attachement à son héritage inca et aux principes incas de « Ayni et Minka », un engagement fort à travailler ensemble pour le bien commun, qui se retrouve dans les plans visant à intensifier le reboisement dans d’autres pays andins.

« Autrefois, nous étions le plus grand empire d’Amérique du Sud, uni par une seule culture, la culture inca. », explique M. Aucca. « Ce fut la première fois que nous nous sommes tous réunis. La deuxième fois que nous nous sommes réunis en un même mouvement, ce fut pour nous libérer du joug espagnol, pour revendiquer notre indépendance. Aujourd’hui, nous nous réunissons pour la troisième fois. Pourquoi ? Pour protéger un petit arbre. »

Lorsque, en 2019, le Trésor (ministère des Finances) du Royaume-Uni a contacté Sir Partha Dasgupta pour qu’il procède à une étude des aspects économiques de la biodiversité, une première pour un ministère des Finances semble-t-il, l’éminent économiste de l’université de Cambridge a accepté sans hésiter.

Pendant environ 18 mois, M. Dasgupta et son équipe ont combiné des preuves scientifiques, économiques et historiques avec une modélisation mathématique rigoureuse pour rédiger The Economics of Biodiversity: Dasgupta Review.

Publié en février 2021, ce rapport historique montre que la croissance économique a eu des conséquences dévastatrices pour la nature. Le rapport indique clairement que l’humanité est en train de détruire son bien le plus précieux, la nature, en vivant au-dessus des moyens de la planète et il insiste sur les estimations récentes selon lesquelles il faudrait 1,6 Terre pour maintenir le niveau de vie actuel.

« Les prévisions économiques parlent d’investissements dans les usines, du taux d’emploi, de la croissance [du produit intérieur brut]. Elles ne mentionnent jamais le sort réservé aux écosystèmes », explique Sir Partha Dasgupta, lauréat du prix « Champions de la Terre » 2022 du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) dans la catégorie « Science et innovation ». « Il est vraiment urgent que nous nous penchions sur la question dès maintenant », ajoute-t-il.

Ce rapport est l’aboutissement de quatre décennies de travaux au cours desquelles M. Dasgupta a cherché à repousser les limites de l’économie traditionnelle et à mettre en évidence le lien entre la santé de la planète et la stabilité des économies.

Le rapport The Economics of Biodiversity est la pierre angulaire d’un domaine en plein essor, connu sous le nom de comptabilisation du capital naturel, dans lequel les chercheurs tentent d’évaluer la valeur de la nature. Ces données peuvent aider les gouvernements à mieux comprendre les coûts économiques à long terme de l’exploitation forestière, de l’exploitation minière et d’autres industries potentiellement destructrices, renforçant ainsi les arguments en faveur de la protection de la nature.

« La contribution avant-gardiste de Sir Partha Dasgupta à l’économie au fil des décennies a permis de sensibiliser le monde à la valeur de la nature et à la nécessité de protéger les écosystèmes qui alimentent nos économies, assurent notre bien-être et enrichissent nos vies », a déclaré Inger Andersen, directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE).

L’économie comme élément d’une « mosaïque »

Sir Partha Dasgupta est né en 1942 à Dhaka, l’actuelle capitale du Bangladesh (à l’époque, la ville faisait partie de l’Inde). Son père, le célèbre économiste Amiya Kumar Dasgupta, l’a énormément influencé dans sa carrière universitaire. Après avoir décroché une licence en physique à Delhi, M. Dasgupta a déménagé au Royaume-Uni, où il a étudié les mathématiques avant d’obtenir un doctorat en économie.

M. Dasgupta a contribué à structurer le débat mondial sur le développement durable et l’utilisation des ressources naturelles grâce à ses nombreuses contributions majeures à l’économie, pour lesquelles il a été fait chevalier en 2002.

« L’idée selon laquelle, tout autour de vous, se trouvent de véritables usines de la nature, produisant des biens et des services (les oiseaux qui pollinisent, les écureuils qui cachent les noix, et tout ce qui se trouve sous nos pieds) est magnifique », explique Partha Dasgupta.

« C’est une mosaïque déconcertante de choses qui se produisent, dont beaucoup sont inobservables. Et pourtant, elles constituent le milieu dans lequel les êtres humains et tous les organismes vivants peuvent survivre. La façon dont nous mesurons le succès ou l’échec économique, toute la morphologie de l’économie, doit être pensée en gardant cette mosaïque à l’esprit. »

 

L’amour de la nature

Selon M. Dasgupta, son intérêt pour l’idée de vivre de manière durable dans un monde aux ressources naturelles limitées remonte à son article désormais classique de 1969 intitulé On the Concept of Optimum Population. Dans les années 1970, l’économiste suédois Karl-Göran Mäler l’a encouragé à développer ses idées sur les liens entre pauvreté rurale et état de l’environnement et des ressources naturelles dans les pays les plus pauvres du monde, un sujet qui, à l’époque, était particulièrement absent du courant dominant de l’économie du développement.

Cela a conduit à d’autres explorations des relations entre population, ressources naturelles, pauvreté et environnement, travaux pour lesquels M. Dasgupta est devenu célèbre.

« J’ai eu beaucoup de plaisir à travailler dans ce domaine », a-t-il déclaré. « L’une des raisons pour lesquelles cela a été plaisant est que je n’avais pas de concurrence. Personne d’autre ne travaillait sur ces sujets. »

Les prairies, les forêts et les lacs d’eau douce font partie des écosystèmes préférés de M. Dasgupta. Il est convaincu que les enfants devraient être initiés à l’étude de la nature dès leur plus jeune âge et que cette matière devrait être obligatoire tout comme la lecture, l’écriture et les mathématiques. « C’est ainsi que l’on peut générer un certain amour de la nature. Si vous aimez la nature, vous aurez moins tendance à la saccager », expliquait-il.

 

Une richesse inclusive

M. Dasgupta est convaincu de la nécessité de renoncer au produit intérieur brut (PIB) comme mesure de la santé économique des pays, car celui-ci ne reflète qu’une partie de la réalité. Il plaide plutôt en faveur du concept de « richesse inclusive », qui prend en compte non seulement le capital financier et le capital produit, mais aussi les compétences de la main-d’œuvre (capital humain), la cohésion au sein de la société (capital social) et la valeur de l’environnement (capital naturel).

Cette idée est ancrée dans le Système de comptabilité économique et environnementale, programme soutenu par les Nations Unies, qui permet aux pays de suivre les actifs environnementaux, leur utilisation dans l’économie et les flux de retour de déchets et d’émissions.

Le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) a élaboré l’Indice de richesse inclusive. Désormais calculé pour environ 163 pays, cet indice montre que la richesse inclusive s’est accrue de 1,8 % en moyenne entre 1992 et 2019, un taux bien inférieur à celui du PIB, en grande partie à cause du déclin du capital naturel.

 

La nature comme capital

Reflétant la priorité de l’initiative Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes, qui vise à prévenir, stopper et inverser la dégradation des écosystèmes, l’ouvrage de M. Dasgupta intitulé Economics of Biodiversity met en garde contre le fait que des écosystèmes essentiels, des récifs coralliens ou des forêts tropicales, sont en passe d’atteindre des points de basculement dangereux, avec des conséquences catastrophiques pour les économies et le bien-être des populations.

Ce rapport de 600 pages appelle à repenser fondamentalement la relation entre l’humanité et la nature et la valeur qui lui est accordée, soulignant que le refus d’inclure les « services écosystémiques » dans les bilans nationaux n’a fait que renforcer l’exploitation de la nature.

« [Il faut] inclure la nature comme capital dans la réflexion économique et démontrer que les possibilités économiques dépendent entièrement de cette ressource limitée », a déclaré M. Dasgupta.

Dès l’enfance, la Dre Purnima Devi Barman, lauréate du prix « Champions de la Terre » de cette année dans la catégorie « Vision entrepreneuriale », a développé un intérêt pour les cigognes, un intérêt qui allait se transformer en véritable passion.

À l’âge de cinq ans, elle fut confiée à sa grand-mère, qui vivait sur les rives du fleuve Brahmapoutre, dans l’état indien de l’Assam. Séparée de ses parents et de ses frères et sœurs, la jeune fille était inconsolable. Pour la distraire, sa grand-mère, une agricultrice, commença à l’emmener dans les rizières et zones humides avoisinantes pour lui faire découvrir les oiseaux qui y vivaient.

« J’y ai découvert les cigognes ainsi que de nombreuses autres espèces. Elle m’a appris à reconnaître le chant des oiseaux. Elle me demandait de chanter pour les aigrettes et les cigognes. C’est ainsi que je me suis prise de passion pour les oiseaux », explique Purnima Devi Barman, spécialiste de la biologie de la faune sauvage, qui a consacré une grande partie de sa carrière à la protection du marabout argala, la deuxième espèce de cigogne la plus rare au monde.

 

Une espèce en sursis

Actuellement, on estime à moins de 1 200 le nombre de marabouts argala adultes vivant dans la nature, soit moins de 1 % de leur population il y a un siècle. Le déclin spectaculaire de leur population est en partie dû à la destruction de leur habitat naturel. Les zones humides où les cigognes prospèrent ont été asséchées, polluées et dégradées, remplacées par des bâtiments, des routes et des tours de téléphonie mobile à mesure que l’urbanisation des zones rurales s’est accélérée. Les zones humidesabritent une grande diversité de vie animale et végétale, mais dans le monde entier, elles disparaissent trois fois plus vite que les forêts en raison des activités humaines et du réchauffement climatique.

 

Le conflit entre l’homme et la faune sauvage

Après un master en zoologie, Barman a entamé un doctorat sur le marabout argala. Mais, constatant l’extinction d’un grand nombre des oiseaux avec lesquels elle avait grandi, elle décida de reporter sa thèse pour se consacrer à la préservation de l’espèce. Elle lança une campagne de protection du marabout en 2007, en se concentrant sur les villages du district de Kamrup, dans l’état de l’Assam où la population d’oiseaux est la plus importante et la moins bien acceptée.

Ici, le marabout est victime de son caractère charognard : il se nourrit de carcasses, rapporte des os et des animaux morts dans les arbres où il niche (dont beaucoup poussent dans les jardins), et produit des excréments malodorants. Ces oiseaux mesurent environ 1,50 mètre de haut et leur envergure peut atteindre 2,40 mètres. Les villageois préfèrent souvent couper les arbres de leur jardin plutôt que de laisser les marabouts y nicher. « Cet oiseau était totalement incompris. On voyait en lui un mauvais présage, un signe de malchance ou un porteur de maladie », explique Dre Barman, qui a elle-même fait l’objet de moqueries pour avoir tenté de sauver les colonies de nidification.

Selon un rapport publié en 2021 par le Fonds mondial pour la nature (WWF) et le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), les conflits entre l’être humain et la faune sauvage constituent l’une des principales menaces pour les espèces sauvages. Ces conflits peuvent avoir des répercussions irréversibles sur les écosystèmes qui permettent toute vie sur Terre. L’initiative Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes est une opportunité de mobiliser la communauté mondiale pour restaurer l’équilibre dans la relation entre l’homme et la nature.

 

« Hargila Army »

Pour protéger le marabout, Dre Barman savait qu’elle allait devoir changer la façon dont est perçu cet oiseau, connu localement sous le nom de « hargila » en assamais (ce qui signifie « avaleur d’os »). Elle mobilisa donc un groupe de villageoises pour l’aider.

Aujourd’hui, « Hargila Army » compte plus de 10 000 femmes. Elles protègent les sites de nidification, soignent les cigognes blessées tombées du nid et organisent des « baby showers » pour fêter l’arrivée des nouveau-nés. Le marabout argala apparaît régulièrement dans les chansons folkloriques, les poèmes, les festivals et les pièces de théâtre.

Dre Barman a également aidé les femmes à se procurer des métiers à tisser et du fil afin qu’elles puissent créer et vendre des textiles décorés à l’effigie du marabout argala. Cet engagement permet non seulement de faire connaître cet oiseau, mais aussi de contribuer à l’indépendance financière des femmes, de renforcer leurs moyens de subsistance et de leur inculquer la fierté et le sentiment d’appartenance grâce à leur travail pour sauver les marabouts.

Depuis le lancement du programme de protection de Dre Barman, le nombre de nids dans les villages de Dadara, Pachariya et Singimari, dans le district de Kamrup, est passé de 28 à plus de 250, ce qui en fait la plus grande colonie de reproduction du marabout argala au monde. En 2017, Dre Barman a lancé la construction de hautes plateformes de nidification en bambou pour que les oiseaux en voie de disparition puissent couver leurs œufs. Ses efforts ont été récompensés quelques années plus tard lorsque les premiers poussins de marabouts argala ont éclos sur ces plateformes expérimentales.

 

Restauration des écosystèmes

Pour DreBarman, la protection du marabout argala passe par la préservation et la restauration de son habitat. Grâce à la Hargila Army, les communautés ont planté 45 000 arbustes à proximité des arbres de nidification des cigognes et des zones humides dans l’espoir qu’ils puissent accueillir de futures populations de marabouts. Il est prévu de planter 60 000 arbustes supplémentaires l’année prochaine. Ces femmes mènent également des campagnes de nettoyage sur les berges des rivières et dans les zones humides dans le but de débarrasser l’eau du plastique et de réduire la pollution.

« Le projet avant-gardiste de conservation de Purnima Devi Barman a permis à des milliers de femmes de s’émanciper, de créer des entreprises et de renforcer leurs moyens de subsistance tout en sauvant le marabout argala de l’extinction », a déclaré Inger Andersen, directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). « Les travaux de Dre Barman ont montré que les conflits entre l’être humain et la faune sauvage peuvent être résolus dans l’intérêt de tous. En soulignant les effets néfastes de la disparition des zones humides sur les espèces qui s’y nourrissent et s’y reproduisent, elle nous rappelle l’importance de protéger et de restaurer les écosystèmes. »

Dre Barman déclare que l’une de ses plus grandes récompenses a été le sentiment de fierté qui a été insufflé à « Hargila Army » et elle espère que son succès inspirera la prochaine génération de défenseurs de l’environnement à poursuivre leurs rêves. « Être une femme engagée dans la protection de l’environnement dans une société dominée par les hommes est un défi, mais « Hargila Army » a démontré que les femmes peuvent faire bouger les choses », a-t-elle déclaré.

Cécile Bibiane Ndjebet a grandi dans une région reculée du Cameroun et avait une conscience aiguisée des difficultés auxquelles font face les femmes rurales. Elle a vu sa mère et d'autres femmes travailler de l'aube au crépuscule, pour cultiver, s'occuper des animaux et élever les enfants. Beaucoup d'entre elles effectuaient un travail éreintant sur des terres qu'elles ne pourraient jamais posséder en raison des pratiques socioculturelles traditionnelles.

"Je me suis rendu compte que les femmes affrontaient beaucoup de difficultés", se souvient Cécile Ndjebet. "Je voulais protéger ma mère et défendre les intérêts de ces femmes rurales, pour améliorer leurs conditions de vie. Elles souffraient trop."

Ces premières expériences ont façonné la vie de Cécile Ndjebet. Cécile allait par la suite devenir une voix majeure pour les droits fonciers des femmes en Afrique, passant trois décennies à défendre l'égalité des sexes tout en prenant soin de centaines d'hectares abîmés par le développement. Plus de 600 hectares de terres dégradées et de forêts de mangrove ont été restaurées sous sa direction de Cameroon Ecology, une organisation qu'elle a co-fondée en 2001.

Afin de reocnnaître cette réussite, le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) a nommé Cécile Ndjebet Championne de la Terre dans la catégorie "inspiration et action", le prix environnemental le plus important décerné par les Nations unies.

L'humanité a considérablement modifié les trois quarts des terres arides de la planète, abattant les forêts, asséchant les zones humides et polluant les rivières à un rythme que les experts jugent insoutenable.

Cécile Ndjebet fait partie des leaders du mouvement visant à réparer ces dommages.

Ses convictions ont débouché sur un projet de Cameroon Ecology visant à former des femmes pour faire revivre plus de 1 000 hectares de forêt d'ici à 2030.

Depuis 2009, Cécile Ndjebet est également à la tête des efforts visant à promouvoir l'égalité des sexes dans la gestion des forêts dans 20 pays africains en tant que présidente du Réseau des femmes africaines pour la gestion communautaire des forêts (REFACOF), une organisation qu'elle a cofondée. Les activités de plaidoyer de Mme Ndjebet, tant dans son pays qu'à l'étranger, visent à encourager une plus grande représentation des intérêts des femmes dans les politiques environnementales.

En 2012, elle a été élue championne de la cause du changement climatique de la Commission des forêts d'Afrique centrale pour son rôle de premier plan dans la mobilisation des organisations de la société civile en faveur de la gestion durable des forêts. Cécile Ndjebet est également membre du conseil consultatif de la Décennie des Nations unies pour la restauration des écosystèmes, une initiative mondiale visant à redonner vie aux paysages dégradés.

Garantir la vitalité des forêts

Les femmes représentent près de la moitié de la main-d'œuvre agricole en Afrique subsaharienne et peuvent jouer un rôle clé dans la lutte contre la faim et la pauvreté. Pourtant, les femmes, en particulier dans les zones rurales, rencontrent souvent des problèmes pour posséder des terres ou en hériter après le décès de leur mari.

Malgré ce préjugé, les femmes continuent de protéger les écosystèmes forestiers dans des pays comme le Cameroun, où environ 70 % des femmes vivent en milieu rural et dépendent de la cueillette de fruits, de noix et d'herbes médicinales dans les forêts pour assurer un revenu à la famille.

"Les femmes sont vraiment le moteur de la restauration. Elles reboisent les zones dégradées, elles plantent des arbres, elles développent des pépinières. Elles pratiquent l'agroforesterie. Même celles qui pratiquent l'élevage ont des arbres. Elles maintiennent la forêt en vie", a déclaré Cécile Ndjebet.

REFACOF a aidé des groupes de femmes à reboiser des terres dégradées et des forêts de mangrove, à créer des pépinières et à planter des vergers au Cameroun et dans d'autres pays membres. Il s'est également efforcé de persuader les chefs de village d'autoriser les femmes à planter des arbres sur les terres côtières afin de les protéger contre la hausse du niveau des mers causée par le changement climatique.

Grâce à son travail de plaidoyer plus large, à l'échelle du continent, REFACOF a proposé des politiques forestières aux gouvernements de 20 États afin de garantir les droits des femmes dans la gestion des forêts et des ressources naturelles.

Des études ont montré que si les femmes des zones rurales avaient le même accès à la terre, à la technologie, aux services financiers, à l'éducation et aux marchés que les hommes, la production agricole de leurs exploitations pourrait augmenter de 20 à 30 %, ce qui suffirait à transformer des vies.

Mme Ndjebet a déclaré que lorsqu'elle a demandé aux femmes quels étaient leurs espoirs pour la Décennie des Nations unies pour la restauration des écosystèmes, elles citent trois éléments : la reconnaissance et le soutien de leur rôle dans la restauration, l'accès aux financements et le partage des connaissances.

Mme Ndjebet dit avoir été guidée par une longue succession de femmes, dont sa grand-mère, sa mère et ses sœurs. Une rencontre avec Wangari Maathai, militante kenyane de l'environnement et première femme africaine à recevoir le prix Nobel de la paix, lui a également laissé une impression durable qui a façonné son travail depuis lors.

Elle m'a dit : "Dites aux femmes africaines de prendre soin de leur environnement comme elles prennent soin de leurs enfants. Dites-leur de planter des arbres fruitiers. Ils leur donneront de la nourriture, de l'argent et les arbres resteront là pour l'environnement et pour l'humanité", se souvient Cécile Ndjebet.

L'engagement de la maire de Quezon City, Josefina "Joy" Belmonte, en faveur de la protection de l'environnement remonte aux lendemains de la pire tempête qui ait frappé les Philippines depuis des décennies.

Le typhon Ketsana, qui a frappé en 2009, a déclenché des pluies diluviennes et des inondations féroces qui ont submergé les routes et forcé les habitants à se réfugier sur les toits. Lorsque les eaux se sont retirées, elles ont laissé dans leur sillage une rivière de sacs en plastique, de sachets et d'autres déchets.

Ce spectacle a marqué durablement Mme Belmonte, qui s'est présenté avec succès au poste de vice-maire de Quezon City en 2009 avant d'en devenir le maire en 2019.

"Je milite en faveur de la bonne gouvernance", a déclaré Mme Belmonte au Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE). "La bonne gouvernance implique une bonne gestion de l'environnement".

Deuxième femme maire dans l'histoire de Quezon City, qui compte 3,1 millions d'habitants, Mme Belmonte a mis en œuvre une série de politiques visant à mettre fin à la pollution plastique, à lutter contre le changement climatique et à rendre la ville plus verte.

Pour ses efforts visant à faire de Quezon City une ville pionnière en matière d'environnement, Mme Belmonte a été nommée Championne de la Terre 2023 pour son leadership politique, l'une des plus hautes distinctions environnementales décernées par les Nations unies.

"Le leadership passionné et les réalisations politiques de la maire Josefina Belmonte illustrent la manière dont les autorités locales peuvent résoudre les problèmes environnementaux mondiaux", a déclaré Inger Andersen, directrice exécutive du PNUE. "Les villes peuvent être les moteurs dynamiques du changement dont nous avons besoin pour surmonter la triple crise planétaire du changement climatique, de la perte de la nature et de la biodiversité, et de la pollution et des déchets - et les maires peuvent aider à mener cette charge.

Mayor Josefina Belmonte stands next to a resident in front of a convenience store. Both are looking at refill pumps for detergent and other daily essentials.
Convenience stores around Quezon City are introducing refill pumps, reducing plastic pollution and making essential goods more affordable. (UNEP/Pau Villanueva)

Lutter contre la culture du jetable


Quezon City a été la capitale des Philippines pendant 27 ans, jusqu'à ce que le titre revienne à Manille en 1976. Aujourd'hui, c'est la ville la plus peuplée du pays et elle fait partie de l'agglomération de Manille.

Les liens de Mme Belmonte avec cette ville sont profonds. Non seulement elle y est née et y a grandi, mais son père, Feliciano "Sonny" Belmonte, en a été le neuvième maire.

Malgré une exposition précoce à la politique, les intérêts de Mme Belmonte l'ont d'abord menée ailleurs, notamment vers une carrière d'archéologue. Mais finalement, l'appel du service public s'est avéré trop fort.

"Si vous pouvez être dans une position où vous pouvez être une source d'inspiration pour les autres et devenir la racine d'un changement positif pour des millions de personnes, alors cela en vaut la peine", a-t-elle déclaré.

Pour Mme Belmonte, le changement positif consiste à donner la priorité à l'action en faveur de l'environnement afin de créer une ville vivable, verte et durable.

Sous la direction de Mme Belmonte, la ville de Quezon s'est attachée à réduire la pollution plastique et à prolonger la durée de vie des produits en plastique déjà en circulation.

"La pollution plastique est un problème majeur aux Philippines, comme dans de nombreuses régions du monde, en raison de la culture du jetable", a déclaré M. Belmonte. "Les plastiques obstruent nos systèmes d'évacuation et finissent dans les océans. Nous savons que les déchets plastiques se transforment en microplastiques qui peuvent se retrouver dans la nourriture que nous mangeons, dans l'air que nous respirons et même dans l'eau que nous buvons, ce qui nuit à notre santé."

À l'échelle mondiale, la dépendance de l'humanité à l'égard des produits en plastique à courte durée de vie a provoqué une catastrophe environnementale. Environ 19 à 23 millions de tonnes de plastique se déversent chaque année dans les écosystèmes aquatiques, polluant les lacs, les rivières et les mers. Pour endiguer ce flux, les experts affirment que le monde doit modifier radicalement sa relation avec le plastique en utilisant moins de ce matériau, en éliminant les produits à usage unique, en réutilisant les plastiques produits et en trouvant des solutions de remplacement respectueuses de l'environnement.

Sous la magistrature de Mme Belmonte, la ville de Quezon a interdit les sacs, couverts, pailles et récipients en plastique à usage unique dans les hôtels, les restaurants et les chaînes de restauration rapide pour les clients à table, ainsi que les matériaux d'emballage à usage unique.

Depuis 2021, les habitants peuvent échanger leurs déchets recyclables et leurs produits en plastique à usage unique contre des points environnementaux qui peuvent être utilisés pour acheter de la nourriture et payer les factures d'électricité dans le cadre du programme "Trash to Cashback". Les autorités municipales ont même lancé un programme "Vote to Tote" pour transformer en sacs les bâches utilisées lors des campagnes électorales.

Pourtant, des millions de sachets en plastique à usage unique sont jetés chaque jour aux Philippines, qui sont une source majeure de plastiques océaniques. Bien que les sachets permettent aux ménages d'avoir un accès plus abordable aux produits essentiels pour la cuisine, l'hygiène et l'assainissement, ils ne peuvent pas être recyclés efficacement, ce qui nuit gravement à l'environnement, selon les experts.

"La culture du sachet me touche vraiment. C'est vraiment quelque chose qui me met en colère parce qu'elle existe parce que nous sommes un pays pauvre", a déclaré Mme Belmonte. "Les grands fabricants doivent faire leur part et changer la façon dont ils emballent leurs produits pour les rendre plus respectueux de l'environnement.

Pour lutter contre la pollution plastique, Mme Belmonte a lancé en 2023 une initiative visant à installer des stations de recharge pour les produits de première nécessité, tels que le liquide vaisselle et le détergent liquide, dans les magasins de proximité de la ville. Avec des produits qui sont souvent moins chers que leurs équivalents emballés, les stations ont été accueillies positivement et seront testées dans plus de 6 000 magasins l'année prochaine, a déclaré Mme Belmonte.

L'année dernière, les Nations unies ont adopté une résolution historique visant à élaborer un instrument international juridiquement contraignant pour mettre fin à la pollution plastique. Mme Belmonte a insisté sur la nécessité d'un instrument mondial "véritablement ambitieux".

"Les maires veulent participer à la table des négociations car nous avons une expérience très pratique à apporter", a-t-elle déclaré. "Le véritable travail se fait au niveau des villes. Nous savons déjà que lorsque le changement se produit au niveau des villes, il se produit beaucoup plus rapidement.

Gagner la confiance

Sous la direction de Mme Belmonte, la ville de Quezon a également élaboré un plan ambitieux visant à réduire ses émissions de carbone de 30 % d'ici à 2030 et à parvenir à une émission nette nulle d'ici à 2050. Elle a déclaré l'état d'urgence climatique afin de débloquer des fonds, représentant 11 à 13 % de son budget annuel, pour des programmes visant à atténuer les effets de la crise climatique.

Il est prévu de doubler le nombre de parcs dans la ville, d'introduire davantage de bus électriques et de presque quadrupler le réseau de pistes cyclables d'ici à 2030 pour lutter contre la pollution. Parmi les autres initiatives écologiques, citons la promotion de l'agriculture urbaine et le déploiement d'équipements permettant aux fermes communautaires de transformer les déchets organiques en méthane utilisable pour la cuisine.

Bien que Mme Belmonte ait travaillé dur pour tracer sa propre voie, elle considère qu'un conseil de son père n'a pas de prix : "Passez toujours du temps avec les gens. Allez surtout dans les communautés pauvres, car lorsque vous allez dans les communautés et que vous voyez à quel point la vie est difficile pour les gens de la base, vous ne penserez jamais à abuser du pouvoir".

Ces conseils ont façonné son approche politique, l'ont aidée à gagner la confiance du public et ont contribué à sa popularité auprès des électeurs. Elle a été réélue maire en 2022 et obtient régulièrement la meilleure cote de popularité parmi les maires de la région métropolitaine de Manille.

"Les citoyens adhéreront à votre vision si vous accordez de l'importance à ce qu'ils ont à dire. C'est le meilleur moyen de faire passer tous nos problèmes environnementaux", a déclaré Mme Belmonte.

Four women hold up green cards.
Through Mayor Belmonte’s “Trash to Cashback” programme, citizens can return recyclable plastic products for points that can be used to buy food and pay electricity bills. (UNEP/Duncan Moore)

 

À propos des Champions de la Terre du PNUE

Le prix "Champions de la Terre" du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) récompense les personnes et les organisations dont les actions ont un impact transformateur sur l'environnement. Le prix annuel des Champions de la Terre est la plus haute distinction environnementale des Nations unies. #EarthChamps

À propos de la campagne #CombattreLaPollution

Pour lutter contre l'impact omniprésent de la pollution sur la société, le PNUE a lancé #CombattreLaPollution, une stratégie d'action rapide, à grande échelle et coordonnée contre la pollution de l'air, des sols et de l'eau. Cette stratégie met en évidence l'impact de la pollution sur le changement climatique, la perte de la nature et de la biodiversité, et la santé humaine. Grâce à des messages scientifiques, la campagne montre que la transition vers une planète sans pollution est vitale pour les générations futures.

Ellen MacArthur n'avait que 24 ans lorsqu'elle est entrée dans l'histoire en devenant la plus jeune skipper à effectuer un tour du monde à la voile en solitaire en 2001. Quatre ans plus tard, elle a battu le record du tour du monde en solitaire le plus rapide, avec un peu plus de 71 jours.

Son récit de la lutte contre les vents violents, du contournement des icebergs et de l'évitement de justesse d'une collision avec une baleine a captivé des millions de personnes. L'effort mental et physique de la navigation, la liberté de la haute mer, l'émotion d'être immergé dans la puissance et la beauté époustouflantes de l'océan sont tout ce dont MacArthur a toujours rêvé. 

Puis, au sommet de sa carrière, elle s'est retirée de la compétition et a changé complètement de cap. 

Le temps passé seule en mer, à survivre avec des réserves limitées de nourriture, d'eau et de carburant, a donné à Mme MacArthur une conscience aiguë de ce que signifie vivre avec des moyens limités. Elle a établi un parallèle avec l'humanité, qui consomme au-delà de ce que la Terre peut fournir. 

"On ne peut pas utiliser des ressources limitées dans un monde où la population augmente. Cela ne peut tout simplement pas fonctionner", a déclaré M. MacArthur au Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE). "Nous devons repenser et redéfinir l'ensemble de notre modèle économique".  

En 2010, la pionnière a créé la Fondation Ellen MacArthur afin de soutenir une économie mondiale plus circulaire, axée sur l'élimination des déchets et de la pollution, y compris des plastiques, et la promotion de la la réutilisation des produits et des matériauxet la régénération de la nature.

La Fondation Ellen MacArthur a été nommée "Championne de la Terre 2023" dans la catégorie "Inspiration et l'action", l'une des plus hautes distinctions des Nations unies en matière d'environnement.

"Nous avons besoin d'une transformation systémique pour faire face à la crise de la pollution plastique", a déclaré Inger Andersen, directrice exécutive du PNUE. "La Fondation Ellen MacArthur a joué un rôle déterminant dans l'engagement des entreprises et des décideurs, permettant des solutions à grande échelle qui peuvent nous guider vers un avenir débarrassé de la pollution plastique". 

De la ligne droite au cercle

Depuis le lancement de son premier rapport en 2012 lors du Forum économique mondial de Davos, en Suisse, la fondation a radicalement changé le discours de certaines des entreprises mondiales les plus puissantes et a aidé les gouvernements à comprendre les changements nécessaires pour créer des économies plus durables. 

Elle a lancé des initiatives mondiales sur les plastiques, la mode et l'alimentation, tout en créant un réseau de chefs d'entreprise, de décideurs politiques et d'universitaires pour piloter des pratiques durables. Cette année, elle a lancé le Circular Startup Index, une base de données publique regroupant plus de 500 start-ups qui accélèrent la transition vers une économie circulaire. La fondation a également contribué à l'élaboration du programme du tout premier master en administration des affaires axé sur ce modèle.

Aujourd'hui, 430 millions de tonnes de plastique sont produites chaque année, dont les deux tiers deviennent rapidement des déchets. La pollution plastique entraîne des coûts sociaux et économiques de l'ordre de 300 à 600 milliards de dollars par an et a précipité ce que le secrétaire général des Nations unies, António Guterres, a qualifié de catastrophe environnementale.

Lorsque la Fondation Ellen MacArthur a été lancée en 2010, peu de gens parlaient de la pollution plastique. 

En 2016, la fondation a réalisé la première grande étude mondiale sur les emballages plastiques. Ses conclusions, qui ont immédiatement fait les gros titres dans le monde entier, ont été un signal d'alarme. Le rapport a conclu que la plupart des emballages en plastique ne sont utilisés qu'une seule fois et que 95 % de la valeur des matériaux d'emballage en plastique, d'une valeur stupéfiante de 80 à 120 milliards de dollars américains par an, sont perdus pour l'économie. 

Un rapport de suivi publié en 2017 a montré qu'en l'absence d'une refonte et d'une innovation fondamentales, environ 30 % des emballages en plastique ne seront jamais réutilisés ou recyclés.

"Les plastiques représentent un volume très important et une faible valeur. Ils sont l'exemple ultime d'économie linéaire", a déclaré M. MacArthur. l'exemple ultime de l'économie linéaire", a déclaré M. MacArthur. "Si nous voulons vraiment passer d'une économie linéaire à une économie circulaire, alors c'est c'est un très bon point de départ.

D'ici à 2040, l'adoption d'une approche fondée sur le cycle de vie pourrait permettre de réduire de plus de 80 % le volume de plastique entrant dans l'environnement, de diminuer de 55 % la production de plastique vierge et de réduire de 25 % les émissions de gaz à effet de serre. Repenser la façon dont l'humanité produit, utilise, récupère et élimine le plastique pourrait également permettre d'économiser 4,5 billions de dollars américains d'ici 2040.

En collaboration avec le PNUE, la Fondation Ellen MacArthur est à la tête de l'engagement mondial pour une nouvelle économie des plastiques. Cet engagement réunit plus de 1 000 organisations, dont des géants des biens de consommation tels que H&M, PepsiCo et Coca-Cola, ainsi que des gouvernements représentant 1 milliard de personnes, autour d'une vision commune visant à empêcher que le plastique ne devienne un déchet.

Les leçons et les données tirées de l'engagement mondial offrent des indications précieuses à l'heure où les négociateurs s'efforcent d'obtenir un instrument international juridiquement contraignant pour mettre fin à la pollution plastique d'ici à 2024. 

Un troisième cycle de négociations sur le projet de document de l'instrument doit débuter à Nairobi le 13 novembre. Selon les observateurs, l'instrument final pourrait être le pacte environnemental multilatéral le plus important depuis l'accord de Paris de 2015 sur le changement climatique. 

Pour la Fondation Ellen MacArthur, l'accord doit donner la priorité au passage des produits en plastique à usage unique aux produits en plastique réutilisables

En ce qui concerne l'avenir, M. MacArthur espère que l'approche du cycle de vie sera un jour si normale que la fondation ne sera plus nécessaire. 

"La course au large et les records nous enseignent l'importance de l'objectif", a déclaré M. MacArthur. "Il faut être motivé et savoir exactement où l'on veut aller. Je considère l'économie circulaire comme une opportunité. C'est un endroit fantastique à atteindre".

À propos des Champions de la Terre du PNUE

Les Champions de la Terre du PNUE récompensent des individus, des groupes et des organisations dont les actions ont un impact transformateur sur l'environnement. Le prix annuel des Champions de la Terre est la plus haute distinction environnementale des Nations unies. #EarthChamps

À propos de la campagne #CombattreLaPollution

Pour lutter contre l'impact omniprésent de la pollution sur la société, le PNUE a lancé #CombattreLaPollution, une stratégie d'action rapide, à grande échelle et coordonnée contre la pollution de l'air, des sols et de l'eau. Cette stratégie met en évidence l'impact de la pollution sur le changement climatique, la perte de la nature et de la biodiversité, et la santé humaine. Grâce à des messages scientifiques, la campagne montre que la transition vers une planète sans pollution est vitale pour les générations futures.

 

Dans un décor inchangé depuis des générations, les pêcheurs se lèvent avant l'aube pour sillonner les eaux côtières de la province chinoise du Zhejiang, dans l'espoir d'une pêche abondante.

Ces jours-ci, nombre d'entre eux ont autant de chances de revenir à terre avec une cale pleine de plastique qu'avec du poisson.

En effet, depuis 2019, l'initiative environnementale Blue Circle rémunère les pêcheurs du Zhejiang - et les habitants des communautés côtières - pour qu'ils ramassent les débris de plastique, tels que les sacs, les bouteilles et les filets de pêche abandonnés.

Le plan fait partie d'un effort ambitieux, soutenu par des équipements de pointe et la technologie blockchain, visant à éliminer et à gérer la pollution plastique le long de certaines parties des 6 600 km de côtes de la province. La poussée est également conçue pour fournir des avantages aux communautés locales.

Depuis son lancement, l'initiative a obtenu l'aide de 10 240 bateaux et de 6 300 pêcheurs et résidents locaux pour recycler près de 2 500 tonnes de plastique.

"Nous espérons que le modèle de gestion des déchets marins de Blue Circle pourra s'étendre au-delà de ce pays et dans le monde entier, en incitant davantage de personnes à agir pour lutter contre la pollution marine", a déclaré Chen Yuan, chef de la division de l'environnement écologique marin du département de l'écologie et de l'environnement de la province de Zhejiang.

Pour sa contribution à la lutte contre la pollution plastique, Blue Circle a été nommée Championne de la Terre 2023 pour sa vision entrepreneuriale, l'une des plus hautes distinctions environnementales des Nations unies.

"L'addiction de l'humanité au plastique menace la santé de notre planète, notre bien-être et notre prospérité", a déclaré Inger Andersen, directrice exécutive du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE). "Pour assurer une transition juste et améliorer les moyens de subsistance, nous devons adopter l'innovation. Blue Circle démontre ce qu'il est possible de faire lorsque la technologie et la durabilité s'allient.

Seven small fishing boats unload plastic onto a barge for recycling.
Blue Circle mobilize fishers to collect and sort marine plastic pollution. (UNEP/Justin Jin)

Des solutions inédites 
Développé par le département de l'écologie et de l'environnement de la province de Zhejiang et Zhejiang Lanjing Technology, Blue Circle affirme qu'il s'agit du plus grand programme de recyclage des déchets plastiques marins en Chine.

L'initiative a développé une plateforme numérique qui utilise la technologie blockchain et le suivi sur internet pour tracer le parcours des pièces de plastique individuelles.

Des flux en direct des bateaux, des ports et des lignes de production, ainsi que des cartes interactives, répertorient la collecte, l'expédition, le stockage, le recyclage et la refabrication du plastique. Les acheteurs peuvent accéder à ces informations en scannant les codes QR sur les produits fabriqués à partir de plastique certifié provenant de l'océan.

L'utilisation par Blue Circle de la technologie blockchain et du web offre un aperçu passionnant de l'avenir de l'action environnementale.

"Nous avons créé une plateforme numérique qui peut servir de modèle au monde entier", a déclaré Chen Yahong, directeur général de la division Marine Business de Zhejiang Lanjing Technology, lors d'un entretien avec le PNUE.

D'ici 2025, Blue Circle prévoit de rendre son système numérique public et de l'étendre à un éventail d'entreprises, y compris les petites entreprises et le secteur informel, les gouvernements et les organisations de protection sociale.

L'approche de l'humanité consistant à "produire, utiliser et jeter" le plastique est à l'origine d'un cauchemar environnemental. Plus de 90 % du plastique jamais produit est enterré, brûlé ou s'est répandu dans l'environnement, généralement après une seule utilisation. Les émissions liées à cette approche à courte vue pourraient représenter près d'un cinquième des émissions mondiales de gaz à effet de serre dans le cadre des objectifs les plus ambitieux de l'Accord de Paris d'ici à 2040.

Avantages pour les communautés de pêcheurs 
Avec la culture du thé et de la soie, la pêche est un pilier de l'économie rurale du Zhejiang. Mais elle n'est plus l'industrie qu'elle était en raison du vieillissement démographique des zones côtières.

Pour aider les communautés à faibles revenus, Blue Circle propose une série d'incitations financières et d'avantages. Il paie ses "nettoyeurs d'océans" 0,2 yuan chinois (3 ¢ US) pour chaque bouteille en plastique collectée, soit environ sept fois plus que le taux du marché.

Les membres de Blue Circle ont accès à une assurance sociale de base et à des prêts à faible taux d'intérêt accordés par des banques et des coopératives de crédit rurales via une plateforme numérique. Jusqu'à présent, des prêts d'une valeur de 130 millions de yuans (18 millions de dollars américains) ont été accordés dans le cadre de ce programme.

L'initiative a également mis en place un "fonds de prospérité" financé par les bénéfices de la vente de particules de plastique aux entreprises manufacturières. Grâce à ce fonds, les collecteurs de déchets plastiques gagnent en moyenne 1 200 yuans (165 dollars) par mois. En travaillant avec le gouvernement et les entreprises, Blue Circle a soutenu plus de 6 000 résidents et pêcheurs à faibles revenus dans les zones côtières.

"Le Zhejiang pratique la protection de l'environnement dans tous les secteurs en collaboration avec les gouvernements, les entreprises et le public. Cela favorise la croissance économique et protège les écosystèmes marins, et les habitants du Zhejiang attendent avec impatience un environnement naturel magnifique et un espace écologique de grande qualité", a déclaré Chen Yuan.

À l'échelle mondiale, le PNUE collabore avec les gouvernements et les entreprises afin de promouvoir une transition équitable pour les plastiques, y compris dans les pays en développement. Il s'agit d'assurer une production et une consommation durables des plastiques d'une manière qui soit juste et inclusive pour toutes les personnes concernées, y compris les ramasseurs de déchets et les autres travailleurs de la chaîne de valeur des plastiques. L'adoption de solutions numériques et la promotion de la transparence peuvent jouer un rôle essentiel dans la réalisation de ces objectifs. En outre, cette approche ne favorise pas seulement la création d'emplois décents, elle est également essentielle pour garantir l'inclusion, un facteur crucial pour la réalisation de cet objectif, selon les experts.

Harmonie avec la nature 
La Chine produit encore quelque 30 % du plastique mondial, mais le pays a pris des mesures pour lutter contre la pollution plastique et son impact sur l'environnement.

La Chine a interdit l'importation de déchets plastiques en 2018 et ne reçoit plus la majeure partie des déchets plastiques des pays développés. Plus récemment, le gouvernement a dévoilé des plans visant à éliminer progressivement tous les produits en plastique à usage unique et non biodégradables d'ici 2025.

Le ministère de l'écologie et de l'environnement a reconnu que le travail de Blue Circle méritait d'être promu dans tout le pays. Avec le soutien des ministères à tous les niveaux, Blue Circle espère étendre considérablement ses activités pour couvrir 289 ports dans neuf provinces côtières et deux municipalités d'ici 2025.

Selon Chen Yuan, du département de l'écologie et de l'environnement, le succès de Blue Circle tient en grande partie aux avantages mutuels que le projet est censé apporter aux communautés de pêcheurs : des revenus pour des eaux côtières plus propres.

Il souligne également les antécédents de la province en matière d'action environnementale. En 2018, le programme de revitalisation rurale verte du Zhejiang a été nommé "Champion de la Terre". Le mouvement écologique du Zhejiang a pris de l'ampleur lorsque le président Xi Jinping, alors chef du parti de la province, s'est rendu en 2003 dans la ville d'Anji, située à flanc de colline et recouverte de forêts. Xi y a vanté les vertus de la protection de la nature et a déclaré : "Les eaux claires et les montagnes luxuriantes sont aussi inestimables que l'argent et l'or".

Chen Yuan a déclaré : "Les gens ont en effet vu de leurs propres yeux ce qui se passe dans la nature : "Les gens ont en effet vu de leurs propres yeux que les eaux claires et les montagnes verdoyantes valent le prix de l'or".

A man threading thin strips of plastic through a device.
Blue Circle uses blockchain technology to certify the goods it makes from plastic collected from the ocean. (UNEP/Justin Jin);

 

À propos des Champions de la Terre du PNUE

Le prix "Champions de la Terre" du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) récompense les personnes et les organisations dont les actions ont un impact transformateur sur l'environnement. Le prix annuel des Champions de la Terre est la plus haute distinction environnementale des Nations unies. #EarthChamps

À propos de la campagne #CombattreLaPollution

Pour lutter contre l'impact omniprésent de la pollution sur la société, le PNUE a lancé #CombattreLaPollution, une stratégie d'action rapide, à grande échelle et coordonnée contre la pollution de l'air, des sols et de l'eau. Cette stratégie met en évidence l'impact de la pollution sur le changement climatique, la perte de la nature et de la biodiversité, et la santé humaine. Grâce à des messages scientifiques, la campagne montre que la transition vers une planète sans pollution est vitale pour les générations futures.