Par M. Gaetano Leone, Coordonnateur du PNUE/PAM–secrétariat de la Convention de Barcelone
Les mots comptent, surtout lorsqu’ils se voient consignés dans un document officiel d’une réunion intergouvernementale rassemblant ministres et hauts fonctionnaires de 21 pays méditerranéens et de l’Union européenne.
La vingt et unième Réunion des parties contractantes (COP21) à la Convention de Barcelone et à ses Protocoles a adopté une série de décisions visant à soulager les écosystèmes méditerranéens sujets aux pressions conjuguées de la quête non durable de croissance et des changements climatiques. Négocier et adopter des décisions relèvent d’un processus ambitieux en soi, mais les Parties contractantes sont allées plus loin en exprimant leur préoccupation face aux tendances de dégradation environnementales de plus en plus visibles en Méditerranée et en affirmant leur engagement à changer la donne.
Lorsque le texte de la Déclaration ministérielle de Naples a été soumis pour examen et adoption, un consensus remarquable a régné dans l’enceinte de Castel dell’ Ovo, l’imposant château médiéval en bordure de mer qui a accueilli les travaux de la COP21. Le langage vigoureux de la Déclaration dénote une forte détermination de la part des Parties contractantes à traiter le mal qui accable le bassin méditerranéen.
En sus des 14 décisions adoptées à la COP21, parmi lesquelles figure une proposition inédite de feuille de route pour la désignation éventuelle de la Méditerranée comme zone de contrôle des émissions d’oxydes de soufre, la Déclaration ministérielle de Naples vient apporter un appui renouvelé au mandat du Plan d’action pour la Méditerranée du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE/PAM), notamment en ce qui concerne le bon état écologique et le développement durable dans la région.
« Nous nous engageons à prendre des mesures concrètes pour renforcer le niveau de protection de la mer Méditerranée, y compris son littoral, et son bon état écologique, en tant que lieu de paix, de dialogue et de solidarité, en tant que pont entre les civilisations et en tant que modèle de protection de l’environnement dans le contexte du développement durable et de la coopération multilatérale, au profit des générations actuelles et futures » affirment les Parties contractantes à la Convention de Barcelone dans la Déclaration.
Le texte décrit 2020 comme un « tournant décisif pour la conservation et la gestion durable de la mer Méditerranée et de ses côtes » et souligne la « nécessité changement systémique soutenu par des stratégies, des politiques et des comportements novateurs et tournés vers l’avenir ».
Notant l’importance des quatre domaines d’action prioritaires identifiés à la COP21, à savoir les déchets marins, la biodiversité et les aires marines protégées, l’économie bleue et le changement climatique, les Parties contractantes conviennent dans la Déclaration de les intégrer dans la Stratégie à moyen terme 2022–2027 du système PNUE/PAM–Convention de Barcelone.
Mais la Déclaration va bien au-delà d’une simple expression d’intention. En appelant à la mise en œuvre effective du Plan régional sur la gestion des déchets marins en Méditerranée (dans le cadre de l’article 15 du Protocole sur les sources de pollution terrestres) et en soulignant l’urgence de prévenir et de réduire considérablement les fuites de plastique en mer Méditerranée d’ici à 2025, elle identifie des pistes d’action. En outre, le texte comprend un objectif assorti d’une échéance : atteindre au moins 10 % de couverture de la région méditerranéenne par des aires marines protégées d’ici la fin de 2020.
La communauté des parties prenantes complétant et soutenant le travail du système PNUE/PAM–Convention de Barcelone doit saisir ce moment d’engagement politique élevé pour exiger des progrès plus rapides sur tous les fronts, notamment en ce qui concerne l’application des instruments juridiquement contraignants existants et les protocoles qui ne sont pas encore entrés en vigueur, parfois parce qu’une seule ratification leur fait défaut.
Les partenaires du PNUE/PAM au sein de la société civile méditerranéenne dynamique ont un rôle important à jouer s’agissant de transformer les engagements en actions. La sensibilisation du public et le regard attentif des médias peuvent maintenir l’enthousiasme.
En 2020, appelée « super année » pour la biodiversité et pour les océans, le Plan d’action pour la Méditerranée aura besoin de tout le soutien qu’il pourra obtenir. Le cadre juridique complet offert par la Convention de Barcelone et ses Protocoles doit se traduire en action sur le terrain.
L’investissement qui doit être fait dans l’adaptation aux changements climatiques offre des possibilités de voies de croissance plus durables et résilientes. Il sera également crucial de libérer le potentiel de l’économie bleue sans peser davantage sur les écosystèmes méditerranéens. Faisons de la Déclaration ministérielle de Naples un manifeste pour une nouvelle donne pour la mer Méditerranée et son littoral.