La dernière fois que vous avez ouvert votre frigo et que vous avez dû jeter quelque chose, c'était quand ? Pour beaucoup d’entre nous, c’est plus courant que nous ne voudrions bien l’admettre.
L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture estime que, chaque année, un tiers des aliments produits ne se retrouveront pas sur la table du consommateur.
Cela a pour résultat un gaspillage et une inefficacité considérables, des problèmes mis en évidence dans la dernière note de synthèse des Nations Unies sur les objectifs de développement durable (en anglais).
Réduire le gaspillage alimentaire est considéré comme l’un des cinq domaines prioritaires pour adopter des modes de vie plus durables. Y parvenir avec succès nécessite la prise de mesure à tous les niveaux.
En tant qu'individus, il est possible de lutter contre le gaspillage alimentaire en cuisinant moins, en partageant avec ses voisins, en achetant des produits qui ne sont pas conformes aux normes esthétiques en vigueur, en compostant et en informant notre entourage. Mais des changements systématiques dans les principales industries sont également nécessaires pour s'attaquer au problème mondial du gaspillage alimentaire.
Garrette Clark, responsable du programme sur les modes de vie durables auprès d'ONU Environnement, affirme : « Les particuliers comme les fournisseurs d’aliments peuvent réduire le gaspillage alimentaire en planifiant leur besoin en aliments, en concevant des plats préparés avec les restes et en conservant les aliments de manière appropriée pour optimiser leur fraîcheur ».
Elle affirme également que les problèmes systèmiques plus généraux peuvent également être résolus en recherchant activement des aliments produits de manière durable, en abordant la question d'aliments sains et durables avec les vendeurs et les producteurs, en évitant les emballages excessifs ou en initiant des potagers urbain, scolaire ou individuel, tout en soutenant les organisations et les politiques qui promeuvent des systèmes alimentaires plus durables.
Naomi MacKenzie, âgée de 26 ans, a cofondé une organisation pour relever ce défi. KITRO, sa start-up basée en Suisse, a pour but de fournir une solution automatisée pour capturer des données et lutter contre le gaspillage alimentaire dans le secteur de l'hôtellerie.
Parlez-nous de KITRO, qu'est-ce qui vous a inspiré à lancer cette entreprise ?KITRO est né d'un concours universitaire et opère maintenant dans toute la Suisse. Nous avons des projets d'expansion dans les pays voisins. Cet appareil de cuisine analyse les aliments jetés dans une cuisine. Le logiciel d'accompagnement envoie aux utilisateurs un rapport sur le type de nourriture gaspillée et les coûts encourus.
Pourquoi avez-vous souhaité travailler sur cette question environnementale en particulier ? Le co-fondateur de KITRO et moi-même avons passé de nombreuses heures à travailler dans les cuisines et pour des traiteurs dans le secteur de l'hôtellerie. En tant que membres du personnel débutants, nous avons été amenés à jeter chaque jour d’énormes quantités d’aliments comestibles. Les choses ont tendance à fonctionner vite dans les cuisines et il est difficile d'avoir une vue d'ensemble sur les quantités jetées. Lorsque nous avons commencé à rechercher des solutions pour mesurer le gaspillage alimentaire, nous avons constaté que les options existantes étaient manuelles. Il est devenu évident que pour lutter contre le gaspillage alimentaire, nous devions savoir quelle nourriture était jetée et quelle quantité de nourriture était gaspillée. Chez KITRO, notre objectif est de fournir une solution à long terme qui devienne aussi essentielle qu'un lave-vaisselle ou un four et qui aide les entreprises à suivre leurs déchets au fil du temps. Nous générons des données via des solutions automatisées qui s'intégrent parfaitement aux routines des cuisines et des services.
Quels effets positifs espérez-vous que vous produit aura sur l'environnement ? Si vous pensez à la génération précédente, la nourriture avait une valeur beaucoup plus élevée. Nous penserions avant de jeter quelque chose. À mesure que les aliments sont devenus meilleur marché, nous avons perdu conscience de ce que signifie produire une carotte, à savoir, les ressources en eau nécessaires à la culture de ce produit ainsi que la main-d'œuvre, l'emballage, le transport. Notre objectif est de sensibiliser les consommateurs au gaspillage alimentaire et de leur montrer, y compris aux grandes entreprises et à l'industrie, que même si le gaspillage alimentaire est un énorme problème, il est possible d'agir et d'apporter un changement positif.
À votre avis, l'industrie hôtelière devient-elle plus durable ? Cela a absolument changé et pour le mieux. De nombreux groupes hôteliers ont maintenant des équipes de responsabilité sociale, des stratégies de développement durable et des rôles tels que ceux de responsable du développement durable. C'est une tendance croissante et positive.
Quels ont été les principaux obstacles à la création et au perfectionnement de votre produit? Nous voulions créer un produit basé sur la technologie, mais nous ne savions même pas coder ! Cela a été un obstacle majeur. Néanmoins, comme nous avons dû réfléchir et expliquer clairement notre projet à nos collaborateurs, le fait que nous n'étions pas capables de concevoir notre produit nous-mêmes s’est avéré positif. Ensuite, nous avons eu la chance de recevoir un soutien tout au long du processus, mais le démarrage d’une entreprise en Suisse est très coûteux. Notre premier client, le restaurant Holy Cow, a exprimé son intérêt pour notre projet sur la base de nos réflexions initiales présentées sur papier. Unicorn Labs, une association qui crée des prototypes pour de nouvelles idées, a conçu notre produit gratuitement, couvrant les coûts matériels en échange de la promotion et de la reconnaissance de notre collaboration. De nombreux acteurs nous ont aidés à surmonter l'obstacle financier, mais cela demeure un défi.
Quel conseil donneriez-vous aux jeunes entrepreneurs qui souhaitent créer une entreprise afin de les aider à se battre pour un avenir durable? Tout prend plus de temps que prévu. Qu'il s'agisse de construire du matériel, de collecter des fonds, d'embaucher du personnel, l'imprévu survient et prend une éternité. Dans une start-up, la vitesse et l’agilité sont considérées comme importantes, mais il est toujours préférable d’être généreux dans le calcul des délais. Considérez un scénario externe à partager et un scénario interne avec des délais supplémentaires. Ensuite, si vous avez besoin de quelque chose, n'hésitez pas et demandez ! La pire chose qui puisse arriver est que quelqu'un vous dise non. Demander de l'aide nous a ouvert de nombreuses portes. Étant une équipe très jeune, nous n’avions pas beaucoup d’expérience dans la création ou la gestion d’entreprise, mais avec le soutien adéquat, nous avons réussi à créer une entreprise dynamique.
Le prix Jeunes champions de la Terre, soutenu par Covestro, récompense et soutient les jeunes entrepreneurs qui font une différence pour l'environnement. Les gagnants 2019 seront annoncés en septembre. Le portail de candidatures pour la prochaine édition ouvrira en janvier 2020. Restez à l'écoute !