Quand Burger King a lancé son nouveau burger le 1er avril, on aurait pu penser que c’était une blague. La chaîne de restauration rapide mondiale, qui vend des "Whoppers" à plus de 11 millions de personnes par jour, a affirmé que son célèbre burger serait servi sans son ingrédient principal : le steak haché.
Pourtant, ce changement avisé est bien réel, tout comme le hamburger à base de plantes sans steak haché. Fabriqué à partir de protéines de soja, le "Impossible Whopper" possède une texture similaire à celle de la viande et est conçu par le lauréat du prix Champion de la Terre décerné par ONU Environnement, est à l'origine de cette innovation.
Le Impossible Burger n'a pas été développé sans obstacles. Ses ingrédients comprennent des protéines de soja ajoutées à une levure génétiquement modifiée, qui a fait l’objet de critiques avant même d’avoir été approuvée par la Food’s Drug Administration des États-Unis l’an dernier.
Cependant, ce changement témoigne de l’inquiétude croissante suscitée par la production non durable de viande. Burger King et Impossible Foods fournissent un moyen de s'attaquer à ce problème sans demander aux consommateurs de sacrifier leur amour de la viande.
« Les consommateurs sont de plus en plus conscients des avantages de manger moins de viande à la fois pour leur santé et pour l'environnement. Commander un Impossible Burger est un moyen simple et savoureux d'adopter un régime alimentaire sain et durable », affirme Clementine O’Connor, chargée de programme pour les systèmes de développement durable des systèmes d’alimentation d'ONU Environnement.
Selon certaines estimations les plus prudentes, l'élevage, en plein croissance, représente environ 15% des émissions mondiales de gaz à effet de serre chaque année.
« Impossible Foods et Burger King offrent une solution aux personnes qui souhaitent consommer un hamburger au goût de viande, mais qui se soucient également de l'environnement. Attrayant pour les personnes qui n'avaient pas pour habitude de commande un hamburger végétarien, ce nouveau partenariat offre une nouvelle option fléxitarienne excellente sur un menu traditionnellement riche en viande »,se réjouit-elle.
« Ce que nous nous aimerions voir bien sûr, ce sont de plus petites portions de viande, de meilleure qualité, des bêtes élevées en plein air, localement et biologiques, dans le cadre d’un régime alimentaire varié à base de plantes », a ajouté Mme O’Connor. « Près du tiers de l'empreinte carbone des entreprises du secteur de la restauration rapide est due à la production de viande de bœuf, ce qui constitue un excellent exemple de la manière dont des activités ciblées dans le secteur privé peuvent créer un élan pour un changement systématique. »
Mais changer le système est un processus lent, qui doit se produire sur plusieurs fronts. Les mesures individuelle, l'activisme citoyen, les mécanismes de financement et l’infrastructure publique doivent concourir à la durabilité à long terme.
Tim Christophersen, coordinateur de la branche eau douce, sols et climat d'ONU Environnement, affirme :
« Les individus peuvent faire leur part. Mais les gouvernements du monde entier continuent de fausser les marchés en accordant des subventions agricoles néfastes et en ne prenant pas en compte le coût total de la viande, à savoir ses conséquences pour la santé, pour l'environnement par exemple. Il s'agit d'une défaillance du marché causée par des signaux de politique obsolètes. Ce n'est pas un échec des consommateurs. »
« Si les gouvernements fixaient des signaux politiques, tels que des incitations fiscales, conformément aux objectifs climatiques, les hamburgers sans viande pourraient devenir moins chers que leur équivalent avec viande »,ajoute-t-il. Pourtant, les versions sans viande de Burger King coûteront 1 dollars des États-Unis de plus. « En travaillant avec les gouvernements, il reste encore beaucoup à faire pour changer le statu quo », constate-t-il.
Salman Hussain, coordinateur de l’initiative pour l’économie des écosystèmes et de la biodiversité, affirme que les coûts négatifs plus larges supportés par la société doivent être « incorporés » dans les prix des denrées alimentaires de manière plus générale.
Le coût réel des aliments dépend de la manière dont ils sont produits, distribués, stockés, consommés et éliminés. « Bien que nous ne pouvons pas affirmer qu'une option végétarienne en particulier soit meilleure pour l'environnement et pour les moyens de subsistance de l'homme que n'importe quelle solution de remplacement à la viande, nous savons qu'en général, consommer moins de viande nous aiderait à respecter les limites des ressources de la planète », affirme-t-il.
En effet, le passage d'un régime constitué à 30% de la viande de ruminant aux protéines végétales des consommateurs les plus riches du monde réduirait l'écart entre les perspectives et les besoins en matière de réduction des émissions, c'est à dire l'écart entre le niveau actuel des émissions de gaz à effet de serre et celui où elles doivent se situer pour prévenir des effets nocifs, à savoir contenir l'élévation des températures en dessous de 2 ° C.
La version végan du hamburger de Burger King contient 15% moins de gras et 90% moins de cholestérol. Impossible Foods, l'entreprise qui conçoit ces hamburgers à base de plantes, affirme :
« Nous avons eu l'idée de nous associer avec Burger King en raison de son ampleur considérable, mais également de l'attrait considérable qu'il opère chez les consommateurs carnivores... En plus de satisfaire les clients, les viandes à base de plantes joueront un rôle essentiel pour résoudre l'un des problèmes les plus urgents auxquels la planète fait face : nourrir de manière durable 9,7 milliards de personnes d’ici 2050 tout en utilisant beaucoup moins de ses ressources précieuses.
« Nos consommateurs cibles sont les mangeurs de viande. Nous aimons dire que nous fabriquons de la viande à base de plantes pour les amateurs de viande, sans compromis sur son goût, sa texture ou la nutrition... Notre objectif est de remplacer les animaux en tant que technologie de production alimentaire d'ici 2035 et de fournir aux consommateurs de viande, du poisson et de produits laitiers des aliments qui à la fois ont du goût et sont bons pour la planète », ajoutent-ils.
Dans une étude récente, Impossible Foods a révélé que 91% de leurs consommateurs mangent de la viande. Après avoir essayé l’Impossible Burger, qui ne contient ni antibiotiques, ni hormones, ni contaminants de la chaîne alimentaire, ni cholestérol, leur intérêt pour ce produit est passé de 24 à 40%.
Si cette tendance se poursuit, des changements systémiques interviendront. Une bouchée à la fois.