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31 Mar 2023 Récit Environmental law and governance

Une nouvelle résolution de l’ONU marque un tournant dans la promotion de la justice climatique

Une résolution adoptée cette semaine lors de l’Assemblée générale des Nations Unies à New York a été présentée comme une victoire en matière de justice climatique. Cette résolution prévoit que l’Assemblée générale des Nations Unies demande un avis à la Cour internationale de Justice (CIJ) sur les obligations des pays en matière de lutte contre les changements climatiques.

La résolution a été présentée par Vanuatu, un pays du Pacifique aux prises avec les conséquences de la crise climatique. Coprésentée par plus de 130 pays, la résolution établit que l’Assemblée générale des Nations Unies demandera également l’opinion de la CIJ sur les conséquences juridiques pour les États qui, « par leurs actions ou omissions », ont causé des dommages significatifs en matière climatique ayant une incidence sur d’autres États, en particulier sur les petites nations insulaires parmi les plus vulnérables aux effets des changements climatiques.

« Ce texte n’est pas une solution miracle, mais il peut être une contribution importante à la lutte contre les changements climatiques et à l’action pour le climat, notamment en catalysant une ambition plus élevée afin d’atteindre les objectifs de l’Accord de Paris », a déclaré le Premier Ministre de Vanuatu, Alatoi Ishmael Kalsakau.

Créée en 1945, la CIJ est l’organe judiciaire principal de l’Organisation des Nations Unies (ONU) et a pour fonction de régler les différends entre les États.

Nous avons discuté avec Andy Raine, Responsable de l’Unité des frontières du droit environnemental au sein de la Division juridique du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), de la signification de cette résolution.

Pourquoi cette résolution est-elle importante ?

Andy Raine (AR) : il s’agit d’une avancée très importante en matière de justice climatique pour les générations actuelles et futures. C’est la première fois que la plus haute cour de justice du monde reçoit une demande l’invitant à éclaircir les obligations des États à l’égard de la protection du système climatique, ainsi que les conséquences juridiques en cas de manquement à ces obligations. La portée de cette résolution invite également la cour à ne pas tenir exclusivement compte de l’Accord de Paris. Le texte énonce explicitement plusieurs instruments majeurs relatifs aux droits humains que la cour doit prendre en considération. Un climat sûr est pour beaucoup un aspect fondamental du droit à un environnement sain, et est essentiel à la vie et au bien-être de l’humanité. Cette résolution attire également l’attention sur les conséquences juridiques associées à la provocation de dommages significatifs à l’égard de petits États insulaires en développement en situation de vulnérabilité, tels que Vanuatu, et des générations futures, ouvrant la voie à une responsabilité accrue vis-à-vis de ces groupes. Elle souligne en outre l’influence de la société civile, cette résolution étant le résultat d’une demande insistante d’étudiants en droit d’îles du Pacifique. Cela montre ce qu’il est possible d’accomplir lorsque les premières personnes touchées par les changements climatiques agissent pour protéger leurs droits, et ceux des générations futures.

Que va-t-il se passer maintenant ?

AR : la CIJ va maintenant commencer à rassembler et étudier la documentation pertinente, probablement organiser une ou plusieurs audiences publiques et émettre son avis consultatif sur la question que l’Assemblée générale des Nations Unies lui a posée. Nous ne savons pas exactement quand cet avis devrait être prêt, mais il devrait être publié au cours des 12 prochains mois. Dans le cadre de ce processus, le Secrétaire général de l’ONU prépare un dossier contenant des documents pertinents qui sera transmis à la cour. Le PNUE épaule ses collègues à New York dans cette tâche.

Peut-on s’attendre à voir des États traduits en justice pour leur échec dans la résolution de la crise climatique ?

AR : bien que les décisions de la CIJ ne soient pas juridiquement contraignantes pour les États, elles ont beaucoup de poids et font autorité morale. Ainsi, l’opinion en matière juridique de la CIJ devrait entraîner un nouvel élan important pour inciter les pays à réduire leurs émissions plus rapidement et à renforcer leurs plans et actions climatiques, notamment dans le cadre de l’Accord de Paris. Les avis consultatifs de la CIJ peuvent également être cités dans le cadre d’affaires jugées dans des tribunaux nationaux et aideront tous ceux qui traduisent des États ou des entreprises en justice pour leurs actions ou omissions en lien avec le climat. Enfin, un avis tranché de la CIJ influencera les discussions sur l’action climatique et la responsabilité en la matière.

Quel rôle devrait jouer le droit dans le combat contre la crise climatique ?

AR : le droit donne vie aux engagements climatiques et à nos droits humains. Par exemple, le droit à un environnement propre, sain et durable est désormais reconnu sur le plan juridique dans 156 pays du monde entier. L’année dernière, l’Assemblée générale des Nations Unies a également reconnu officiellement ce droit pour la première fois au niveau international. De ce fait, nous observons désormais de plus en plus de jugements historiques dans le monde entier concernant les changements climatiques et l’environnement. Le PNUE accompagne les pays dans l’établissement et l’application du principe de primauté du droit en matière environnementale, afin de les aider à réaliser la dimension environnementale des objectifs de développement durable et d’autres engagements convenus au niveau international. 

Pourquoi la justice climatique est-elle importante ?

AR : la justice climatique peut avoir différentes significations selon les personnes. Cela étant dit, il est généralement admis que ce concept est constitué par les principes d’équité, de non-discrimination, de participation dans des conditions d’égalité, de transparence, d’impartialité, de responsabilité et d’accès à la justice. Elle concerne notamment les problèmes d’équité et d’égalité à l’intérieur d’une nation, entre les nations et entre les générations. Ces principes sont des éléments fondamentaux pour réussir à mener une transition juste tout en sortant de la crise climatique.

L’un des principes essentiels de l’Accord de Paris repose sur l’idée de « responsabilités communes mais différenciées », supposant que si tous les pays ont le devoir d’agir pour le climat, les types d’action qu’ils entreprennent dépendront de leurs différents contextes nationaux. Cela souligne également que les pays sont touchés différemment par les changements climatiques. Par exemple, Vanuatu est confronté à une menace existentielle résultant de l’élévation du niveau de la mer, alors même que son empreinte carbone est relativement très faible. La justice climatique est également étroitement liée au financement de l’action climatique. Des pays, ressemblant pour la vaste majorité à Vanuatu, ont besoin de financements pour être capables de commencer des constructions, par exemple de défenses contre les inondations, et d’abandonner les combustibles fossiles afin de se diriger vers des voies plus durables.

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