« S’il ne faut retenir qu’une idée forte de ce rapport de synthèse, qui concerne les nations, les entreprises, les investisseurs et toute personne contribuant aux changements climatiques, la voici : en matière de climat, nous devons passer de la procrastination à l’action. Et nous devons le faire sans attendre. » – Inger Andersen, Directrice exécutive du PNUE
L’humanité possède les ressources financières et la technologie nécessaires pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre, mais elle doit agir sans attendre si elle veut éviter une catastrophe climatique de grande ampleur, avertit un nouveau rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), un organisme composé de climatologues de premier plan créé par les Nations Unies.
Changements climatiques 2023 : Rapport de synthèse est le dernier volet du sixième Rapport d’évaluation du GIEC et condense près d’une décennie de recherches climatologiques dans un document de 37 pages.
Selon le rapport de synthèse, la planète s’est déjà réchauffée de 1,1 °C depuis la période préindustrielle, et des actions radicales, rapides et durables en matière d’atténuation et d’adaptation doivent être déployées au cours de cette décennie afin d’éviter les pires conséquences des changements climatiques.
Le rapport de synthèse expose les effets dévastateurs qui toucheraient le monde en cas de crise climatique de grande ampleur, notamment des épisodes de chaleur extrême, des pluies torrentielles, la faim et des pénuries d’eau. Il avertit que ces souffrances toucheraient particulièrement les personnes les plus vulnérables.
Ce rapport de synthèse devrait guider les négociations lors de la Conférence des Parties sur les changements climatiques de Dubaï (COP 28) qui se tiendra cette année et dans le cadre du bilan mondial, où les pays examineront les progrès accomplis pour réaliser les objectifs de l’Accord de Paris.
Selon les mots du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, M. António Guterres, cette publication est « un guide pratique pour désamorcer la bombe à retardement climatique et un guide de survie pour l’humanité ».
Décrivant un contexte désastreux marqué par l’inaction, le rapport de synthèse indique que le monde possède les solutions dont il a besoin pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et s’adapter aux effets des changements climatiques. Ce rapport précise que beaucoup de ces solutions sont déjà mises en œuvre, même si elles ne sont pas déployées à l’échelle adéquate.
Un changement systémique doit avoir lieu dans tous les secteurs de l’économie, comme on peut le lire dans la publication. Ce changement doit concerner en particulier le secteur énergétique, qui devra réduire drastiquement sa dépendance aux combustibles fossiles tout en captant et stockant le carbone lié aux émissions inévitables.
Les centrales éoliennes, solaires et hydroélectriques à petite échelle peuvent accroître la fiabilité des services énergétiques et atténuer des facteurs de vulnérabilité aux changements climatiques, explique le rapport de synthèse. Le secteur du transport doit passer aux biocarburants durables et à l’hydrogène à faible émission, bien qu’une réduction des coûts sera nécessaire. Les voitures électriques alimentées en électricité à faible émission de carbone peuvent contribuer à la réduction des émissions, et des progrès concernant la technologie des batteries pourraient faciliter l’électrification des trains et des camions lourds.
Le rapport de synthèse appelle également les villes à intégrer les déplacements à vélo et à pied à leurs plans d’urbanisation et à assurer que les bâtiments sont construits et modernisés de façon à réduire la consommation d’énergie.
« Comme l’indique le rapport, plusieurs solutions sont à la disposition des responsables politiques pour répondre à cette crise », souligne M. Maarten Kappelle, Responsable des évaluations thématiques scientifiques au Programme des Nations Unies pour l’environnement. « Un développement résilient aux changements climatiques, supposant par exemple l’amélioration de l’accès à des énergies et technologies propres, l’électrification à faible émission de carbone et des déplacements en transport public, est vital. »
Le rapport de synthèse du GIEC souligne en outre que la protection de la résilience de la biodiversité et des services écosystémiques à une échelle mondiale repose sur la préservation équitable et efficace d’environ 30 à 50 % des terres émergées, eaux douces et océans de la planète.
Les ressources financières seront déterminantes pour y parvenir, mais à l’heure actuelle, selon le rapport de synthèse, les flux financiers sont insuffisants pour atteindre les objectifs climatiques dans l’ensemble des secteurs et régions concernés.
Le rapport de synthèse souligne par ailleurs l’importance de protéger les communautés des pays en développement aux prises avec les conséquences de la crise climatique, notamment les inondations, les sécheresses et l’élévation du niveau de la mer.
« L’instauration d’une justice climatique est essentielle, car les populations qui contribuent le moins au changement climatique en subissent des conséquences disproportionnées », signale Mme Aditi Mukherji, l’une des 93 auteurs du rapport de synthèse.
Alors que ce rapport ne fait aucune révélation, il met en lumière la pression imposée par la crise climatique. Afin de limiter la hausse des températures mondiales à 1,5 °C ou moins, l’objectif le plus ambitieux de l’Accord de Paris sur les changements climatiques, le monde doit réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 45 % d’ici la fin de cette décennie.
« Ce rapport correspond globalement à ce qui était attendu », indique M. Kappelle. « Nous savons que le temps presse pour réaliser l’objectif de 1,5 °C, et ce rapport énonce clairement tout ce que nous devons accomplir pour avoir une chance de nous approcher de la cible. »
Le GIEC est la principale autorité en ce qui concerne la recherche scientifique sur les changements climatiques, et ses rapports servent de feuilles de route aux gouvernements dans la réduction des émissions et le traitement de la crise climatique.
Ce rapport de synthèse peut être vu comme un guide pour la prochaine décennie, réunissant les conclusions des six documents publiés par le GIEC depuis 2015. Alors que le prochain rapport du GIEC n’est pas attendu avant 2030, ce rapport de synthèse ressemble à la dernière occasion de stimuler la lutte contre les changements climatiques.
« Ce rapport montre bien que l’engagement politique et la coopération internationale sont essentiels », précise M. Kappelle. « Aucun secteur ou pays n’y parviendra seul. Il est nécessaire de mettre en place une véritable coopération à tous les niveaux. »
Cette vision a également été soulignée par le Président du GIEC, M. Hoesung Lee.
« Les transformations de fond ont plus de chances de porter leurs fruits lorsque règne la confiance, lorsque tout le monde collabore pour se concentrer sur la réduction des risques, et lorsque les avantages et les charges se répartissent équitablement. »
À propos du GIEC
Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) est l’organisme des Nations Unies chargé d’évaluer les travaux scientifiques consacrés aux changements climatiques. Il a été créé par le Programme des Nations Unies pour l’environnement et l’Organisation météorologique mondiale en 1988 et a pour mission de fournir aux décideurs, à intervalles réguliers, une évaluation scientifique des changements climatiques, de leurs conséquences et des risques qui y sont associés, ainsi que de proposer des stratégies d’adaptation et d’atténuation. Il est considéré comme l’organisme faisant autorité en matière de climatologie et ses rapports sont des outils essentiels pour les décideurs politiques du monde entier.