19 Aug 2019 Récit Air quality

Un duo de choc s'attaque à deux défis au Burkina Faso

Faire du bénévolat chaque week-end avec des organisations humanitaires n'est pas pour les timorés. Pour Mani Yezid, étudiant dans le secteur de l'eau et l'assainissement au Burkina Faso, le travail a été dur, mais enrichissant.

« Je voulais vraiment faire une différence dans ma communauté », a-t-il déclaré. « J'ai été témoin de la grande différence que notre travail a apporté et je voulais continuer à aider les autres en tant qu'étudiant des questions relatives à l'eau et à l'assainissement. »

Au cours de son voyage au Niger, Mani Yezid a rencontré un problème récurrent dans les zones de conflit : de nombreux réfugiés ne savaient pas utiliser le gaz de cuisine et préféraient utiliser le charbon et le bois de chauffage.

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Le duo de choc Mani Yezid et Judith Djaonaiel sont passionnés par les causes humanitaires. Photo : Georgina Smith / ONU Environnement

Étudiant à l'Institut international d'ingénierie de l'eau et de l'environnement du Burkina Faso à Ouagadougou (2iE), où il a travaillé aux côtés de la Jeune championne de la Terre de la région Afrique 2017, Mariama Mamane, Mani Yezid était parfaitement conscient de la destruction de l'environnement causée par la déforestation pour fournir du bois de chauffage, notamment au Burkina Faso où de nombreux réfugiés s’installent.

Le bois est le principal combustible utilisé pour la cuisson dans les ménages ruraux, représentant plus de la moitié du bouquet énergétique du Burkina Faso. Environ 18% (en anglais) seulement de la population a accès à l’électricité. On estime que 16 500 personnes meurent prématurément chaque année.

Dans le même temps, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture estime qu’un tiers environ des terres productives du Burkina Faso, environ 9 millions d’hectares, sont dégradées et que cette superficie devrait augmenter chaque année.

« Les problèmes liés à l'énergie de cuisson s'ajoutent à ceux liés à la malnutrition dans les camps », remarque Mani Yezid. « Dans les cas où une action immédiate est nécessaire, après une catastrophe naturelle ou à la suite d'un afflux de réfugiés, les organisations humanitaires doivent réagir rapidement. Au début des interventions, la sécurité alimentaire est souvent une priorité. »

Il existe des poêles et des briquettes éco-énergétiques fabriqués à partir de produits autres que le bois, réduisant ainsi le déboisement et la pollution nuisible de l'air intérieur. Lorsqu'il s'est associé à l'ingénieur agronome Judith Djaonaiel, le duo s'est rendu compte que des solutions plus locales étaient nécessaires.

« Nous espérons que nos foyers à charbon écologique pourront aider les familles à préparer les aliments qui leur sont fournis dans les camps, de manière écologiquement durable, tout en aidant les femmes à mener d'autres activités génératrices de revenus, telles que la vente de gâteaux et d'autres aliments », affirme Judith Djaonaiel.

Le duo a fondé Green Brikstove, mettant à profit son expertise et sa passion de travailler avec les communautés de Ouagadougou et des environs afin de tester leurs produits. Les briquettes sont fabriquées uniquement à partir de déchets alimentaires et les fours efficaces et à cuisson rapide sont fabriqués à partir de conteneurs d’expédition et de pièces de bateau recyclés, qu’ils reçoivent des ports de Lomé au Togo, de Cotonou au Bénin et d’Abidjan en Côte d’Ivoire.

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Les briquettes sont faites uniquement à partir de déchets alimentaires. Photo : Georgina Smith / PNUE

« Nous sommes passionnées par l'innovation et nous apportons notre contribution pour aider les communautés vulnérables », explique Judith Djaonaiel. Leur technologie est encore à l’essai et n’a pas encore été brevetée, mais les résultats ont déjà porté leurs fruits auprès de la communauté locale.

« Nous avons eu l'idée alors que nous étions sur le marché. Nous nous sommes rendus compte que les gens jettent des restes ou de la nourriture qui n'est plus propre à la consommation. Nous avons commencé à utiliser les déchets alimentaires pour fabriquer un prototype et nous avons maintenant un accord avec les acteurs du marché. Ils nous apportent leurs déchets, nous les utilisons pour cuisiner et les transformons en briquettes séchées, que nous leur redistribuons. »

Actuellement, Green Brikstove traite environ 10 kg de déchets alimentaires par jour provenant du marché. Des tests préliminaires montrent que les briquettes sont plus efficaces en combustion que le charbon, réduisant ainsi les émissions nocives.

« Nous sommes encore en train de tester les briquettes comme alternative au bois-énergie et au gaz, qui sont souvent utilisés dans les camps de réfugiés et peuvent être utilisés de manière abusive par des personnes qui n'ont jamais utilisé de gaz auparavant. Nous souhaitons améliorer la vie des femmes, en particulier celles des communautés rurales », souligne Judith Djaonaiel.

Le duo a déjà remarqué un intérêt pour leurs poêles sur les plateformes de médias sociaux où ils ont présenté leur produit, au Togo, au Bénin, au Niger, en Côte d'Ivoire et au Mali. Mais il leur faudra encore un an avant que les poêles soient prêts à entrer sur le marché.

Directeur de l'entrepreneuriat et de la formation continue de premier cycle à 2iE, Djim Doumbe Damba, se réjouit : « Nos jeunes entrepreneurs africains, Mani Yezid et Judith Djaonaiel, proposent une alternative à l'énergie domestique utilisable dans le contexte de situations d'urgence et humanitaires. »

« Leur solution utilise les déchets alimentaires pour lutter à la fois contre la désertification et la pollution de l'air. Si les tests s'avèrent satisfaisants, leur innovation allégera les tâches ménagères des femmes des zones rurales et périurbaines. Nous les encourageons et les soutenons dans leur initiative. »

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De tels développements entrepreneuriaux peuvent réduire l'impact de la pollution de l'air intérieur sur la santé des femmes en particulier. Photo de Georgina Smith / PNUE

Switch Africa Green, à l'initiative du Programme des Nations Unies pour l'environnement, aide les micro, petites et moyennes entreprises, y compris les jeunes entreprises, à passer à des pratiques de consommation et de production durables en favorisant le développement d'entreprises vertes. Patrick Mwesigye, Coordonnateur régional du PNUE pour l’utilisation rationnelle des ressources au Bureau Afrique, affirme :

« En général, l’impact de la fabrication de briquettes est triple : sur le plan environnemental, les communautés impliquée dans la production de briquettes bénéficient du nettoyage des déchets dans leurs résidences, le long des routes et des décharges.

« Sur le plan économique, les entreprises locales fabriquant des briquettes comme celles-ci notent une augmentation de leurs revenus et, socialement, de tels développements entrepreneuriaux peuvent réduire l'impact de la pollution de l'air intérieur sur la santé des femmes, tout en créant des emplois verts, ainsi qu'une augmentation notable de l'emploi pour les femmes et les jeunes. »

Le prix Jeunes champions de la Terre, sponsorisé par Covestro, est l'initiative phare du PNUE qui vise à encourager les jeunes à relever les défis environnementaux les plus pressants du moment. Les finalistes régionaux des Jeunes Champions de la Terre ont d'ores et déjà été annoncés et les lauréats finaux seront annoncés en septembre. Restez à l'écoute !